Le mouvement contre la contre-réforme des retraites a remis au centre du débat la question du travail.
Travailler moins longtemps parce que le travail devient insoutenable, c’est ce qu’ont exprimé nombre de celles et ceux qui se sont engagé·es et continuent de le faire dans la lutte contre l’allongement de l’âge légal de départ à la retraite.
Souffrir au travail est-il inéluctable ? N’y-a-t-il comme solution que de s’en libérer ?
La fierté de faire un travail utile et le sentiment d’être indispensable à la société n’ont-ils pas émergé de manière plus visible durant ces mois de mobilisation ?
Comment faire pour que la quête de bien faire son travail se traduise par l’objectif d’en reprendre le contrôle ?
Nous travaillons, nous décidons
Nous vivons un mouvement social qui dépasse bien largement son cadre initial à savoir le rejet massif de la loi sur les retraites. Il est fortement question, du travail, du contenu du travail, de la pénibilité, de la reconnaissance du travailleur et de la travailleuse dans la société. Ce mouvement par son ampleur et sa durée (du jamais vu depuis mai 68) conteste frontalement les politiques néolibérales à l’œuvre en France depuis 1983.
La question du travail se pose d’une manière inédite et qui touche à l’identité de chacun·e : une conscience nouvelle d’être indispensable à la société émerge. La diversité des métiers n’est plus un facteur de division mais au contraire participe à définir un ensemble. De ce fait ceux qui n’en font pas partie sont montrés du doigt comme adversaire. N’assistons-nous pas à un retour de la lutte des classes ?
Une partie de la jeunesse ne veut plus « jouer le jeu » des bullshits job, certain·es s’accommodent de n’avoir comme revenu que le RSA et un nombre non négligeable de jeunes très diplômés choisissent des emplois utiles socialement, même moins bien rémunérés. Le sens du travail va avec le sens de la vie, dans toutes ses dimensions.
Depuis deux décennies les nouvelles méthodes de management couplées aux remises en cause des droits des travailleurs dans l’entreprise et la destruction des statuts protecteurs provoquent à tous les échelons de l’entreprise et dans toute la Fonction publique de la souffrance, de l’épuisement et de la perte de sens, de ce qu’on pourrait appeler les finalités du travail. Aujourd’hui la course au profit apparaît de plus en plus contre le travail qu’elle déshumanise…
Les attaques contre la démocratie dans l’entreprise sont vécues comme une négation de soi.
Si l’on part des différentes revendications : salariales, effectifs, conditions de travail, volonté de participer à la définition non seulement des conditions de travail mais aussi de sa finalité, ne sommes-nous pas au seuil d’une définition du travail faite non plus par les « employeurs » (lisez les exploiteurs) mais par les travailleuses et travailleurs ?
Cerises a déjà consacré plusieurs dossiers à la question du travail. Nous souhaitons approfondir cette question du travail et de la démocratie en pointant comment aborder de manière à faire échos aux aspirations actuelles la question du travail.
Marylène Cahouet de la FSU, Nara Cladera et Ophélie Gath de Solidaires, Antoine Guérard, Muriel Prévot Carpentier des Ateliers Travail et Démocratie, ont accepté d’en débattre avec l’équipe de Cerises. Catherine Destom-Bottin, Olivier Frachon, Sylvie Larue ont extrait ce qui nous a paru essentiel dans ces deux heures d’échanges qui méritent de poursuivre le débat.
Bonne lecture
L’équipe de rédaction
Décembre 2018 : Travail-hors travail : les chemins de l’émancipation
Mars 2019 https://ceriseslacooperative.info/2019/03/21/cerises-la-cooperative-3-changeons-le-travail/
Janvier 2022 : https://ceriseslacooperative.info/2022/01/05/22-vla-lannee-nouvelle/
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