L’intelligence artificielle prend une place grandissante dans nos vies.
Quels progrès permet-elle de réaliser ?
Quels risques comporte-t-elle? Sont-ils réels ou fantasmés ?
Les « régulations » actuelles peuvent-elles suffire ?
La société peut-elle freiner certains développements de l’IA à l’instar de ce qui a été fait avec le génome humain ?
Aujourd’hui, ce sont les spécialistes et les multinationales qui élaborent les IA et les conceptions du monde qui les accompagnent. Les citoyens en sont exclus. Comment peuvent-ils reprendre en main leur maîtrise ?
Intelligence artificielle, l’urgence d’une maîtrise citoyenne
L’Intelligence Artificielle envahit nos vies. Doit-on s’en inquiéter ? Nos invités tentent d’élucider la question et d’ouvrir le débat dans le dossier du mois.
Pierre Dubois recontextualise l’IA dans l’ère du numérique, véritable révolution technologique et nous aide à la définir. Inès Mekki, Web-designeuse considère l’intelligence artificielle comme un avantage dans sa vie professionnelle, mais craint qu’un jour elle ne prenne sa place. Thomas Coutrot tempère cette inquiétude : « Trente ans après l’apparition de l’informatique et des robots, l’emploi mondial n’a jamais été aussi élevé, même si sa structure a changé. « Nous devrions plus nous préoccuper de la qualité du travail et du contrôle social des innovations ». C’est le cas pour les milliers de travailleurs du clic dont Catherine Bottin-Destom décrit les conditions d’exploitation. Pour Christophe Prud’homme, l’IA constitue un progrès dans le domaine de la santé à condition qu’elle reste au service des médecins et des patients. Fred Bouviolle constate que les algorithmes ont un pouvoir quasi décisionnel sur le versement des allocations à la CAF et font reculer les droits et les libertés. Pour Patrick Vassallo et Pierre Zarka les termes « intelligence artificielle » sont des abus de langage. Pierre Zarka invite à anticiper les risques de l’IA, même si certains sont encore hypothétiques. Ainsi, Jean Gersin rappelle que dès la fin des années 1970, Giscard, Nora et Minc enrôlait le numérique dans un programme politique de darwinisme social. Pendant ce temps, la Gauche et les syndicats pensaient « programme commun ». Pour Josiane Zarka le capital poursuit aujourd’hui la même visée avec d’autres enjeux : « Le véritable enjeu de l’IA n’est pas tant que « l’intelligence » des machines remplacent celle des humains, mais que l’homme naturel puisse être menacé d’obsolescence », car il constitue le principal obstacle aux nouveaux projets du capital. Alexandra Pichardie s’interroge si, avec l’IA, on ne va pas vers un « grand remplacement » des écrivains ? Jean Sève invite à explorer les opportunités révolutionnaires potentielles associées à l’essor de l’IA. Olivier Frachon se demande si construire des machines reproduisant le cerveau humain, ne revient pas à ouvrir une boîte de Pandore ? Daniel Rome fait le point sur les actuelles régulations de l’IA et sur leur efficacité au regard des multiples enjeux de l’IA et de son développement exponentiel.
Il est urgent de réfléchir à une maîtrise citoyenne des choix de conception et d’intégration de l’IA dans nos vies. Des luttes émergent comme le montre Patrick Le Tréhondat avec les travailleurs du clic africains et les acteurs et scénaristes d’Hollywood soutenus par les infirmières.
L’équipe de rédaction
A lire également
Gratuité et émancipation
Démocratie : le pouvoir du peuple ?
Changeons le travail