Horizons d'émancipations.

Une série de dossiers. pour mieux (se) comprendre.

Intelligence artificielle : une belle leçon de choses. 

Non spécialiste de la question, mais en tant qu’historien, je me contenterai de ces quelques remarques. 

L’intelligence artificielle est, avant toute chose, une énième avancée dans le développement révolutionnaire des forces productives contemporaines que le capitalisme promeut, certes, en vue de ses propres fins. Cette dernière est d’abord de… l’intelligence, sous la forme de  travail mort, extraordinaire objectivation des capacités humaines croissantes à remplacer (ou à seconder) le travail manuel ou intellectuel par des mécanismes et des automatismes (machine/mécanisation/robotisation/ automatisation /intelligence artificielle) libérant possiblement les individus du travail productif, ce qui se concrétise historiquement par l’abaissement de la durée du travail et la libération des femmes et des hommes par l’acquisition de temps libre croissant. Cette évolution signifie aussi, ce que chacun sait, des gains de productivité à peine imaginables hier. Néanmoins, comme le souligne André Prone, dans son dernier livre, « L’anticipation communiste », comment qualifier le travail fourni par un robot intelligent, capable de parfaire ses connaissances, ses compétences et ses apprentissages, et capable de produire plus que l’équivalent de la capacité de travail qu’il a fallu dépenser pour le fabriquer ? Question troublante et stimulante mais ce qui m’intéresse, ici, n’est-il pas qu’on a largement sous-estimé cette nécessaire présupposition (développement des forces productives, celle avant tout de la force de travail, développement universel des hommes) à tout processus révolutionnaire à visée communiste. 

Cet essor implique, ici, d’abord de l’intelligence (largement socialisée) et donc des individus hautement développés capables collectivement (ou individuellement) de programmer en vue de satisfaire une demande utile. On voit également la possibilité concrète d’accéder, avec les moteurs de recherche modernes, produits de cette intelligence, à l’ensemble de nos savoirs (dans la mesure où ils sont numérisés) et tout ce que cela induit, à l’avenir comme au présent, dans le développement des individus et dans leurs capacités à produire du socialement utile. Mais que devient alors la propriété des moyens de production dans un tel contexte ? Que devient la marchandise capitaliste, mesurée par le temps de travail, et donc par-là, que devient le travail capitaliste ? C’est dire en très peu de mots les formidables opportunités révolutionnaires qui sont associées à cet essor de l’intelligence artificielle. 

Certes cette possibilité formidable est “développée” négativement, contre l’intérêt commun, par le Capital. Le capitalisme dit de plateforme prolonge et renouvelle cette aliénation principielle qui soumet les individus à la logique du retour sur investissement et à la soumission au consumérisme le plus insensé. Cela perdurera tant que nous ne prendrons pas conscience des formidables opportunités que nous offre cette crise d’une société toujours fondée sur la propriété privative et sur le profit le plus trivial. 

Cette question, comme bien d’autres, montre la nécessaire prise de conscience de l’urgence communiste. Belle leçon de choses !

Jean Sève

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Horizons d'émancipation

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