Culture.

PArce qu’on ne peut pas s’émanciper sans aile !


A la recherche du (nouveau ?) cinéma social

Le cinéma social, qu’est-ce que ça peut bien être ? Une fiction qui « parle de la société », une « non-fiction », un documentaire… On pense à l’incontournable Ken Loach en Grande Bretagne ou à Frederik Wiseman aux Etats-Unis. En France, à Robert Guédiguian, Stéphane Brizé, Gilles Perret dans un style plus documentaire.

Mais d’autres thèmes sont apparus dans les dernières années, souvent portés par des cinéastes plus jeunes et femmes. Si le travail n’en est pas le centre, la place des femmes, des genres, les origines, les espaces urbains et leurs populations diverses sont maintenant sur tous les écrans. En 2021, Catherine Corsini  avec La fracture, nous avait régalés des mésaventures d’un couple lesbien confronté à la crise de l’hôpital en pleine manifestation des Gilets jaunes et réussissait à traiter les trois thèmes à la fois dans un film chorale. Hafsia Herzi, passée de l’autre côté de la caméra, brossait le portrait d’une mère courage des quartiers-nord de Marseille dans Bonne mère. Rodéo de Lola Quivoron en 2022 évoquait le monde des rodéos à moto et la place des femmes, alors que Leonor Seraille mettait en scène une femme venue de Cote d’Ivoire avec ses deux enfants, sa recherche d’autonomie, ses difficultés mais aussi ses joies.

En 2024, plusieurs films abordent d’autres thèmes de façon plus légère ou plus romanesque. Avec La prisonnière de Bordeaux, Patricia Mazuy scénarise un face à face ou un côte à côte entre une grande bourgeoise et une jeune femme des quartiers populaires dont le point commun est un compagnon en prison. Rencontre improbable qui débouche sur un basculement dans l’indépendance. Avec Le roman de Jim des frères Larrieu, c’est la précarité du travail, des boulots alimentaires que choisit Jim comme un miroir à son rôle de père « intérimaire » qui est évoquée. Dans Les gens d’à coté, André Techiné est là où on ne l’attend pas : les conditions de travail de la police, le burn-out mais aussi la répression stupide et la bascule d’une flic percutée par l’amitié qu’elle noue avec ses voisins, une jeune enseignante confrontée à la crise de l’école publique et un artiste engagé dans un regroupement type « black bloc ».

Début octobre prochain, L’histoire de Souleymane de Boris Lojkine chronique 48 heures de la vie d’un livreur en vélo sans papier qui attend son entretien à l’OFPRA.  Une plongée dans le travail des « invisibles » et dans leur vie quotidienne…  En fanfare d’Emmanuel Courcol raconte les retrouvailles de deux frères que tout sépare mais que les coups durs de la vie et la musique, dans deux styles très différents, vont rapprocher. Et on y côtoie même des syndicalistes CGT qui occupent leur usine…

Conflits de classes, toujours présents, mais aussi de genre, d’origine et parfois tout en même temps, entrecroisés, entremêlé, le cinéma se serait-il mis à l’intersectionnalité sans s’en rendre compte ?

Françoise Lamontagne

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