Les élections législatives du mois de juin dernier n’ont pas permis de dégager de majorité absolue et le pays apparaît profondément divisé en trois blocs, sans accords ni compromis possibles, et donc impossible à gouverner. Il serait cependant faux de dire que la situation est illisible. Au contraire, on peut tirer au-moins deux grandes leçons de ces élections :
- Premièrement la politique d’Emmanuel Macron a été largement rejetée. Son parti Renaissance, voit son nombre de sièges fondre (de 170 en 2022 à 98 en 2024) et la coalition présidentielle, incluant le MoDem et Horizons, passe de 250 sièges à 163 (dont 35 sauvés uniquement grâce au désistement des candidatures du Nouveau Front Populaire).
- Deuxièmement, le barrage républicain reste puissant. La forte mobilisation de la société civile, le désistement automatique des candidats/es du NFP, et la participation des électeurs/rices ont déjoué les pronostics en limitant la progression du Rassemblement National (qui passe tout de même de 89 à 143 sièges, ce qui reste alarmant).
Ainsi, d’avantage que la victoire relative du NFP, ce sont plutôt ces deux enseignements qui légitimeraient la mise en place d’un gouvernement de rupture pour contrer à la fois une politique économique austéritaire (réformes des retraites et du chômage par exemple) et une dérive illibérale et idéologique vers l’extrême droite (lois sécurité globale et immigration par exemple). Or les tractations de la fin du mois de juillet révèlent, s’il en était besoin, que le pouvoir macroniste, pour garantir la « stabilité institutionnelle » refuse tout compromis sur sa politique économique mais s’accommode tout à fait de discuter avec l’extrême-droite dont il a désespérément besoin pour s’assurer une majorité à l’Assemblée Nationale. La mobilisation de la société civile va donc être essentielle pour tenir à nouveau le rempart démocratique face à des institutions à bout de souffle et qui ne constituent pas l’alpha et l’omega de la vie politique et citoyenne. Pour cela, il va être nécessaire de maintenir et de consolider, à tous les niveaux, les alliances solides sur la base de revendications antifascistes et progressistes.
C’est cette unité qui a été saluée par deux fois : en 2023 lorsque l’intersyndicale a fait front commun durant de longs mois contre la réforme des retraites puis en 2024 dans le champ partisan de gauche. Les victoires ne sont pas immédiates et totales certes, mais les luttes permettent de construire peu à peu la confiance politique et sont des occasions de politisation de personnes nouvelles. La transformation de mobilisations intenses, mais limitées dans le temps, en mouvements de long terme capables de porter largement des horizons émancipateurs est l’enjeu auquel sont confrontés les mouvements sociaux. Attac prendra toute sa part pour que la bataille soit la plus unitaire possible et qu’elle se nourrisse des luttes qui, si elles sont menées localement, n’en sont pas moins porteuses d’imaginaires alternatifs puissants. L’une des étapes clefs de ces prochaines semaines sera le débat autour du Projet de Loi de Finances qui dessinera la politique budgétaire 2025 et dans lequel Attac portera ses mesures de justice fiscale.
Lou Chesné & Alice Picard
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