Faire sa vie dans les campagnes en déclin
Dans un entretien passionnant, B. Coquard, sociologue, explique le vote massif pour le RN comme une « hégémonie politique » et un style de vie partagé par les campagnes en déclin.
Qui sont aujourd’hui les gens qui votent RN ? Quelles sont leurs préoccupations ? Il écrit à propos d’un milieu (les ruraux du grand Est) dans lequel il s’est immergé pendant plusieurs mois : les habitants des campagnes en déclin, ces gens que les médias comme les politiques connaissent mal et vis-à-vis desquels courent beaucoup de préjugés.
B. Coquard décrit de l’intérieur les vies et les relations sociales du milieu des ruraux restés dans les campagnes (les femmes partent plus que les hommes), et dans lesquelles existent de réels collectifs d’entraide, d’amitié et de convivialité : le clan ou la bande de potes auquel il est important d’appartenir et de se conformer, qui passe par le « d’abord nous » face aux difficultés économiques où le vote RN partagé est gage d’appartenance et de respectabilité.
Les gilets jaunes contre l’augmentation du carburant « on nous prend pour des vaches à lait » ont été le grand moment de révélation d’une sorte de « conscience de classe » face au mépris. « Sauver l’honneur » signifiait que l’appartenance aux Gilets Jaunes n’entacherait pas la réputation, chose importante. B. Coquard note aussi la présence inhabituelle en grand nombre des femmes qui subissent plus que les hommes les contraintes quotidiennes.
Bénédicte Goussault
Ceux qui restent, Faire sa vie dans les campagnes en déclin, B. Coquard, Editions La Découverte, Octobre 2019, 216 pages, 19 euros
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