Les perturbations climatiques et les destructions environnementales favorisent le déclenchement de crises, catastrophes et conflits armés et les conflits eux-mêmes aggravent ces catastrophes.
Pendant la COP 26 en novembre à Glasgow et en particulier le 6 novembre lors de la ‘global action’ pour le climat, des citoyen-nes se sont levé.e.s pour exiger que les dirigeants de du monde agissent, et que les forces armées et industries militaires réduisent aussi leur impact sur le climat. Rappelons au passage que le 6 novembre est, depuis 2001, la Journée internationale pour la prévention de l’exploitation de l’environnement en temps de guerre et de conflit, suite à la Convention ENMOD de 1977 ratifiée par toutes les grandes puissances excepté la France[1].
Les émissions de gaz à effet de serre d’origine militaire étaient explicitement exclues des données depuis le protocole de Kyoto de 1997, à l’époque à la demande des autorités étatsuniennes, et de facto dispensées depuis l’Accord de Paris de 2015. Ce qui laissait aux gouvernements le soin de décider s’il faut ou non assigner un objectif de réduction à leurs forces armées.
Le secteur militaire ne participe pas à l’effort de résistance climatique, le complexe militaro-industriel se montre réticent à assumer ses responsabilités. Or des avions de combat (de type Rafale) consomment plus de 110 litres de carburant par minute, le Département de la Défense des Etats-Unis consomme à lui seul 350.000 barils de pétrole par jour, l’équivalent de la consommation quotidienne de la population suédoise (10 millions d’habitants) et constitue d’ailleurs, l’entité économique la plus polluante au monde. L’empreinte carbone des activités d’origine militaire est considérable.
Grace aux campagnes menées par divers mouvements cet automne, d’abord au Royaume Uni et dans le monde, un peu en France, le sujet est à l’ordre du jour. Une étude de février 2021, commanditée par la Gauche Unitaire Européenne (GUE) au Parlement Européen, et concernant 6 pays, a constaté que seules l’Allemagne, la Slovaquie et Chypre fournissent des données plus ou moins complètes, via les rapports nationaux et européens combinés[2]. Ce n’est pas le cas des autorités françaises, qui de plus excluent l’empreinte carbone des opérations extérieures (OPEX).
Le Département de la Défense des Etats-Unis constitue l’entité économique la plus polluante au monde
Devant cette pression de la société civile, pour la première fois, des puissances militaires en parlent, à commencer par le secrétaire général de l’OTAN, ou par la ministre française des armées qui vient d’annoncer ce 11 novembre « l’adoption par les ministres de la défense de 22 pays d’une initiative proposée par la France pour lancer au niveau international une dynamique pour que les armées soient des acteurs engagés de la lutte contre le réchauffement climatique »[3]. Il est vrai que depuis une quinzaine d’année existent aux Etats-Unis des projets de réduction des consommations, mais qui ne produisent guerre d’effets tant l’inertie est forte en la matière (les programmes d’armements se font sur des décennies, par exemple le nouveau super-jet F.35, qui doit remplacer les F 16 américains est encore plus gourmand en carburant ! Les projets de « verdissement militaires sont d’abord une volonté de rationalisation » ; James Mattis éphémère ministre de la défense de Trump disait « less fuel, more fight », et surtout du « greenwhashing ».Il est de plus extrêmement difficile d’évaluer l’impact des industries d’armement (qui sont des industries aussi civiles).
En France, les mouvements écologiques et progressistes sont, toutes tendances confondues, restés très silencieux et ignorants concernant toutes les questions relatives au militaire, en dehors de quelques protestations rituelles. Les choses commencent à changer, on le voit avec les campagnes sur les ventes d’armes (révélation des journalistes de Disclose, campagne des ONG dont Amnesty International) ou sur la lutte pour la fin de l’exemption des émissions d’origine militaire… Mais pas vraiment encore dans les projets des candidats à la prochaine élection présidentielle.
Ben Cramer, Bernard Dreano.
[1] Résolution A/RES/56/4 de l’Assemblée Générale de l’ONU, Convention ENNOD sur l’interdiction d’utiliser des techniques de modification de l’environnement à des fins militaires ou toute autres fins hostiles du 18 mai 1977.
[2] Conflict and Environment Observatory and Scientists for Global Responsibility. Under the Radar, he Carbon Footprint of Europe’s Military Sector, GUE/NGL Parlement Européen
[3] AFP le 12 novembre 2021.
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