Culture.

PArce qu’on ne peut pas s’émanciper sans aile !


Universalisme et identité ?

Dans « Peau noire, masques blancs » Frantz Fanon tente de redonner du sens à l’universalisme en sortant de l’opposition entre les blancs et les noirs, entre le suprémacisme blanc et le repli identitaire. Il considère que l’isonomie républicaine est loin d’être suffisante pour construire une véritable égalité des droits civiques et politiques.

Parler d’universalisme c’est se perdre dans un sacré labyrinthe. Peut-on continuer à affirmer qu’il y a des valeurs universelles, des principes universels à l’heure où l’on constate une montée en puissance des replis identitaires et des forces qui sont les héritiers des anti-Lumières, ceux qui ont craché leur venin contre tous les progressismes, honni la déclaration des droits de l’Homme et toute leur haine contre la révolution de juin 1848 ou encore la Commune de Paris ?

N’y aurait-il pas des valeurs universelles qui transcenderaient l’espace et le temps ? L’universalisme, c’est considérer que tous les êtres humains, quels que soient leur culture ou leur mode de vie, ont des droits inaliénables et intemporels : droit à l’existence, à la liberté, à l’éducation, à l’égalité, à la santé, à la vie privée. Cette conception de l’universalisme a été consacrée dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Les constitutions républicaines instaurent le principe d’égalité citoyenne dans le cadre d’un État de droit. Sous la 3ème République, la loi de 1905 instaure la séparation des Églises et de l’État, ce qui signifie la neutralité de l’État et la reconnaissance de la liberté religieuse et de croyance de chacun. Pourtant l’égalité est loin d’être respectée et les discriminations perdurent, notamment les discriminations liées à la nationalité.

L’universalisme n’est-il pas dévoyé en France, quand des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants dorment dans la rue ou n’ont pas accès au minimum vital ? L’universalisme a inspiré de nombreuses luttes d’émancipation, les mouvements féministes à travers le monde, les droits civiques aux Etats-Unis d’Amérique, l’abolition de l’esclavage, les luttes d’émancipation contre l’ordre colonial, le droit de vivre son orientation sexuelle librement sans risquer la prison ou la peine de mort.

Aujourd’hui encore, les inégalités économiques mettent en cause une véritable égalité et une véritable liberté quand des millions d’enfants n’ont pas accès au savoir, ou ne mangent pas à leur faim. L’universalisme reste un idéal progressiste et humaniste un projet d’avenir qui doit nous guider. Pour reprendre les propos d’une responsable d’Attac « les droits universels ne sont pas des droits imposés par un ethnocentrisme occidental, ni des droits naturels. Ce sont des droits qui ont été socialement construits et gagnés dans les luttes. Leur existence n’est pas un fait scientifique, mais découle d’un choix, d’un engagement éthique et politique. Nous devons garder à l’esprit que l’universalisme est consubstantiel de l’égalité des droits dans le projet de société à construire. »

Les forces conservatrices et d’extrême-droite font grandir les idées de rejet de l’autre « parce qu’il m’est étranger », mais ne sommes-nous pas une commune humanité, comme l’ont dit les poètes de la négritude ?

Une carte qui mentionne le nom, le prénom, le sexe, la date de naissance et l’adresse, est-ce suffisant pour définir une identité ? Mon identité c’est tout ce qui fait ce que je suis et qui évolue au fil du temps. Elle est biologique, culturelle, familiale, cultuelle, sexuelle. Elle est donc multiple comme mon appartenance. Or le racisme ne se résume pas à considérer qu’il y aurait des races supérieures aux autres, en quelque sorte une vision essentiellement biologique. La trame du racisme c’est aussi considérer des cultures, des religions qui incarneraient la pureté et seraient supérieures aux autres.

A l’heure de la mondialisation des imaginaires, il est urgent de repenser l’Universalisme pour ne pas sombrer dans le Chaos.

Daniel Rome

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