Adjointe d’un maire socialiste, je fus chargée de la démocratie participative dans une ville de 25000 habitants de la banlieue parisienne ; c’était en un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. Nous avons mis en place avec enthousiasme des comités de quartier, de jeunes, de seniors élus par l’ensemble des habitants ; avant la loi Vaillant qui les a institutionnalisés…
Après 2 années de fonctionnement je me suis rendu compte du peu d’effet de ces outils sur une réelle démocratie participative ; ils étaient, en effet, composés de citoyens proches de la municipalité, déjà très engagés dans la vie locale, et très peu autonomes par rapport à la municipalité… ils étaient même, paradoxalement, devenus des écrans par rapport à la population… J’en tirais déjà la conclusion, corroboré par un travail d’étudiants sur la démocratie participative dans la ville de Créteil (Master de sciences sociales université de Créteil ), que soutenir des associations créées à l’initiative d’habitants était plus porteur de participation…
Mais une autre expérience vint alimenter ma réflexion sur la participation : une forte tempête détruisit une grande partie du parc de la ville, parc de 5 hectares fait d’espèces rares, d’un cours d’eau habité par des canards, de parcours de promenade avec bancs, et de jeux pour les enfants… Nous avons alors proposé, par le biais du journal de la ville, aux habitants qui le souhaitaient, de participer à la reconstruction du parc avec l’aide des services espaces verts de la ville… Et en effet une quinzaine de personnes se sont présentées plutôt entre 50 et 70 ans mais quelques jeunes aussi, et plus masculins que féminins… Une commission s’est donc installée avec les services de la ville, et l’adjoint aux espaces verts qui a travaillé pendant 2 mois environ avec de nombreuses déambulations dans le parc, et a produit un projet de reconstruction… J’ai été frappée de ce que beaucoup de ces personnes connaissaient très bien le parc et toutes les espèces d’arbres, et de flores qui y étaient présentes mais aussi par le travail très sérieux, et élaboré à partir de recherches scientifiques, mené pour aboutir à leur projet…
Le conseil municipal a lu le rapport, et rencontré les habitants de la commission et auteurs du rapport, et a suivi leurs propositions, et demandé aux services de le mettre en œuvre sous le contrôle de la commission : ce qui ne s’est pas fait sans heurt… mais ayant travaillé ensemble, les services connaissaient les participants et avaient pu reconnaître leur légitimité, leur sérieux et leurs compétences …
Les travaux ont duré plusieurs mois après lesquels la commission a évalué les résultats et transmis ses commentaires et approbations au maire. Puis le groupe s’est dissous après une célébration officielle et publique de la réussite du projet.
Qu’en penser ? La participation des habitants quand elle est institutionnelle et octroyée par les pouvoirs en place est le plus souvent un faux semblant ou un alibi légitimant l’action des politiques ; elle risque au mieux de créer des écrans supplémentaires entre les politiques et les citoyens… Mais une participation sur un projet et limitée à l’espace du projet et à condition d’être exercée jusqu’à sa mise en œuvre court moins ces risques.
Enfin, les mouvements associatifs, quant à eux, peuvent permettre aux citoyens d’exercer un pouvoir réel et plus indépendant.
Bénédicte Goussault
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