Horizons d'émancipations.

Une série de dossiers. pour mieux (se) comprendre.

Ukraine, de la guerre à la paix ?

Peinture Ukraine

Déjà le huitième mois qui voit un morceau de l’Europe en guerre… Il allait de soi que Cerises la Coopérative se devait de tenter, à son tour, de caractériser le plus justement possible la nature de la guerre en Ukraine enclenchée le 24 février dernier par l’agression russe.

Mais il s’agit aussi, pour Cerises, de s’inscrire dans les efforts de construction d’un processus visant à la sortie du conflit. Cette volonté implique d’entendre les désaccords, de les travailler, et de construire ainsi le socle de la nécessaire unité d’action.

L’équipe de rédaction a donc pris l’initiative d’organiser un échange entre des intervenants connus tout autant pour leurs engagements que par l’exigence intellectuelle qui marque leurs travaux.

Alain Bihr et Bernard Dréano ne sont pas sur la même longueur d’onde. Mais ils débattent sérieusement, respectueusement. Ils seront accompagnés de cinq membres de la rédaction Catherine Destom-Bottin, Alain Lacombe, Sylvie Larue, Patrick Le Tréhondat, Makan Rafatdjou. Vous trouverez, ici ou là, quelques vidéos de leurs débats.

Les dessins qui illustrent le dossier de Cerises sont l’œuvre de Katya Gritseva, jeune artiste révolutionnaire ukrainienne, militante de l’organisation anti-capitaliste Sotsialniy Rukh (Mouvement social). Née à Marioupol, elle est actuellement réfugiée à Lviv à l’Académie des arts.


Débattre pour construire l’unité d’action

S’il est bien une question à laquelle le débat de Cerises ne répondra pas, c’est celle-ci : combien d’hommes, de femmes et d’enfants ont déjà perdu la vie dans cette guerre qui fait rage depuis près de sept mois ? Toujours, en temps de guerre, les chiffres sont stratégiques…

Cerises ouvre le débat au moment où surviennent de nouveaux éléments marquant le conflit. Ainsi, du sabotage à l’origine des fuites des Gazoducs Nord Stream, la Russie  a réclamé et obtenu  une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU,  dénonçant un “acte terroriste” et pointant les USA sans les nommer. Dans la même journée, le gouvernement russe organisait un rassemblement de plusieurs milliers de partisans, accueillant les habitants des territoires ukrainiens annexés, estimant qu’ils étaient « revenus dans leur patrie historique ».

Cette guerre se résume-t-elle à un conflit russo-ukrainien ? Est-elle uniquement la marque de la volonté russe de retrouver ses frontières soviétiques en dépeçant pour une part l’État ukrainien né de l’effondrement de l’URSS, soit l’œuvre et la marque du caractère impérialiste de l’État russe ?

Est-elle la marque d’un conflit inter-impérialiste ? Conflit qui opposerait donc l’ensemble des forces de l’OTAN – dont on rappellera qu’elles sont sous direction étasunienne – à la Russie ?

Ces deux visions sont-elles ensemble vraies ? Ou bien l’une surdétermine-t-elle l’autre ?

L’âpreté de ces questions n’empêche pas de s’interroger – peut-être même y invite-t-elle ! – ici et maintenant : Quelle position et quelle politique la gauche française devrait-elle adopter à l’égard de cette guerre ?

Les forces de gauche européennes regardent-elles ailleurs en comptant sur les initiatives gouvernementales d’aide militaire à l’Ukraine, sans s’investir ni dans l’effort de clarification de la situation, ni même dans la mise en débat de sa complexité ? Ou bien les forces de gauche se doivent-elles de renoncer à jouer les utilités du discours dominant ? Doivent-elles construire leur interprétation propre, fut-elle plurielle, et par là même se mettre en mouvement pour repousser la catastrophe ?

Enfin se demander qui a commencé, quelle est la nature de cette guerre, implique d’en penser l’issue.  Le pacifisme est-il une vieille lubie ? Quand commence la guerre, faut-il attendre – un peu –  pour en penser l’issue ? Ou au contraire en installant dans le débat, contradictoire évidemment, les conditions minimum de l’arrêt de la tuerie, ne travaille-t-on pas à rapprocher le calendrier de la paix ?

Catherine Destom Bottin, Alain Lacombe, Sylvie Larue et Alexandra Pichardie rendent compte des éléments essentiels de la visioconférence qui s’est tenue le 14 septembre dernier.

Alain Lacombe nous invite quant à lui à approfondir le lien entre guerre et crise du système capitaliste. Bernard Dréano revient sur l’importance des mobilisations populaires en faveur de la paix. Dénis Gorbach et Christian Mahieux nous livrent quelques éléments pour rappeler que la guerre en Ukraine n’a pas commencé le 24 février 2022.

Bonne lecture.


LES ÉLÉMENTS DE CE DOSSIER :

Des analyses irréconciliables ?

Quelle est à votre avis la nature de la guerre en Ukraine et de l’agression russe. Se réduit-elle à un conflit inter-impérialistes ? Quels sont les liens ou conséquences de cette guerre sur la crise du capitalisme mondialisé ?

Alain Bihr

Yannis Thanassekos et moi-même avons défendu trois thèses[1] qui s’articulent.

La première, c’est que cette guerre est d’abord la responsabilité de la Russie et du régime russe, réduit quelquefois à son dirigeant Poutine, mais qu’elle ne peut pas, à notre sens, se comprendre seulement comme un conflit entre la puissance impérialiste russe – car il y a bien un impérialisme russe, cherchant à reconstituer l’espace de l’ancien URSS ou même l’espace de l’Ancien Empire tsariste – et d’autre part le jeune état nation ukrainien, qui est né de l’éclatement de l’URSS.

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Quelques éléments à propos de cette guerre

La guerre déclenchée par l’armée russe en Ukraine n’a pas commencé le 24 février 2002 : elle dure depuis 2014, après que la Russie ait annexé la Crimée puis envahi le Donbass. 15 000 morts qu’on ne doit pas passer sous silence. La longue guerre de basse intensité qui s’en est suivie a largement modifié la vision des choses parmi la population ukrainienne.

La soi-disant « opération spéciale » n’a pas atteint ses objectifs. Poutine et ses généraux prévoyaient une victoire éclair et la mise en place d’un régime à son service. Sept mois plus tard, il n’en est rien. Des villes, des villages ont été détruits ; les morts se comptent en dizaines de milliers, de part et d’autre ; la population ukrainienne russophone, que l’armée russe prétend « sauver », est ciblée quotidiennement par ses roquettes ; mais l’Ukraine n’est pas sous la coupe du régime russe.

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Une gauche à la hauteur des enjeux ?

Pour préciser vos réponses, pouvez-vous indiquer quelle position et politique la gauche devrait adopter à l’égard de cette guerre ?

Alain Lacombe : Je pense qu’il y aurait beaucoup de choses à dire sur l’opportunité, pour l’impérialisme occidental, de reprendre l’initiative. Disons que cela permet une contre-offensive de l’impérialisme américain.

Patrick Le Tréhondat : Pendant la guerre, la lutte des classes n’est pas terminée ! … Il y a des affrontements sociaux actuellement en Ukraine. C’est une dimension extrêmement importante parce que cela pose la question de quelle Ukraine après la guerre.

Bernard Dréano : Si on prend l’échelle mondiale, la position majoritaire des forces qui se réclament du progrès, elle est de critiquer les États-Unis.

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Deuxième convoi syndical vers l’Ukraine

Après celui de fin avril, un deuxième convoi du Réseau syndical international de solidarité et de luttes est parti fin septembre en Ukraine, amener du matériel et rencontrer des syndicalistes. Les deux éléments sont importants : répondre, autant que possible, aux besoins exprimés par les travailleuses et travailleurs d’Ukraine confronté∙es à la guerre déclenchée par la Russie ; discuter avec elles et eux, « en vrai », pour prolonger les nombreux échanges Internet que nous avons depuis des mois.

En avril, selon les recommandations des membres de la résistance ouvrière de Kryvyi Rih, le convoi avait donné la priorité à l’acheminement de produits de première nécessité pour les réfugié∙es internes des zones occupées et de la ligne de front, tels que des aliments pour bébés, de la nourriture de survie non périssable.

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Quelle issue à ce conflit ?

Pour Catherine Destom-Bottin « il faut impérativement mettre la paix dans le débat, je ne me sens pas seulement spécialiste de la politique. (…) Il m’est insupportable de vivre dans un pays, dans un monde, où la construction de l’irréparable est fatale, plausible, sans que ça mette le monde cul par-dessus tête. »

Makan Rafadjou pose la question : « Comment travailler idéologiquement le fait que la question de la paix redevienne une question et une préoccupation dominante, qu’on ne s’installe pas dans cet imaginaire de guerre durable qu’on voudrait nous faire croire ? La bataille pour la paix se mène, ou ne se mène pas, si on s’inscrit dans l’optique d’une guerre durable… il y aura des effets sociaux, écologique extrêmement graves et là on ne peut pas dire, c’est uniquement une question internationale, les questions extérieures dont on ne maîtrise pas les tenants et les aboutissants, il y a des leviers sur lesquels on peut agir. »

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La guerre et les mobilisations populaires

La guerre en Ukraine n’est pas seulement une tragédie pour les Ukrainiens et les Russes, mais pourrait se transformer en tragédie pour le monde. Elle a déjà de graves conséquences économiques, sociales, environnementales.

Dans le conflit russo-ukrainien il n’y a pas symétrie, mais un agresseur et un agressé, la fin de l’agression est la condition préalable à tout processus de paix, ensuite une paix durable suppose d’imposer les conditions d’une sécurité commune à toutes les autres parties impliquées, dont celles de l’OTAN.

Les mobilisations populaires peuvent-elles contribuer à la fin de la guerre ? D’abord dans les pays concernés. Malgré les morts la grande masse des ukrainiens demeure engagée dans la défense nationale, voire le peuple en arme. Les indices de découragement à l’arrière, ou d’adhésion passive ou active au projet russe dans les territoires occupés, s’ils existent, demeurent très minoritaires. Du côté russe, jusqu’à la mobilisation décidée par Poutine en septembre, une minorité de l’opinion, soutenait la guerre, une autre minorité la condamnait. La majorité était dans une logique d’évitement. Le premier effet de l’ordre de mobilisation est d’accentuer cette logique, et de provoquer la fuite de dizaine de milliers d’hommes du pays….  Cela peut tout aussi bien favoriser demain la paix, que renforcer aujourd’hui le camp belliciste. Nous avons connu ça en 1956-61 pendant la guerre d’Algérie.

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Nous soutenons les réfractaires à l’armée russe

Antimilitaristes, pacifistes, objecteurs, insoumis, réfractaires, syndicalistes aux armées

Le 24 février, l’armée russe a envahi le territoire ukrainien. Depuis, la population ukrainienne subit les bombes, tirs d’artillerie, chars, qui tuent, mutilent, détruisent. Ils et elles résistent aux attaques décidées par le régime dictatorial de Poutine. Comme dans toute guerre, ce sont les peuples qui sont les premières victimes.

Des témoignages montrent des refus d’obéissance au sein de l’armée russe. Des soldats désertent. Nous devons leur apporter notre solidarité ! C’est aussi un moyen de soutenir ceux qui, en Russie, s’opposent à Poutine et à son régime. Nous sommes pour le droit à l’objection de conscience dans tous les pays et toutes les circonstances.

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Guerre Capitalisme et pénuries

La cause factuelle de la guerre en Ukraine est bien l’ambition impérialiste à l’ancienne de Poutine sur fond de nostalgie de la Grande Russie.

Ce n’est pas remettre en cause sa responsabilité de considérer que ce conflit s’inscrit dans un contexte plus général d’affrontement inter-impérialisme. Les oligarques Russes et Ukrainiens sont issus de la même veine, font des affaires ensemble et, avec tous les grands affairistes du monde, ils sont à la fois partenaires, complices, concurrents, prédateurs des moins forts d’entre eux et exploiteurs ; capitalistes quoi.

Il serait donc naturel que se construisent en Europe et dans le monde des mouvements solidaires avec les forces populaires Ukrainiennes et aussi Russes. Solidaire au sens de l’aide mais aussi parce que nous avons des intérêts communs au regard de ce que cette guerre révèle et permet.

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