Cet article fait partie du dossier “Ukraine, de la guerre à la paix” dont vous pouvez retrouver l’intégralité en cliquant sur l’image à gauche.
La cause factuelle de la guerre en Ukraine est bien l’ambition impérialiste à l’ancienne de Poutine sur fond de nostalgie de la Grande Russie.
Ce n’est pas remettre en cause sa responsabilité de considérer que ce conflit s’inscrit dans un contexte plus général d’affrontement inter-impérialisme. Les oligarques Russes et Ukrainiens sont issus de la même veine, font des affaires ensemble et, avec tous les grands affairistes du monde, ils sont à la fois partenaires, complices, concurrents, prédateurs des moins forts d’entre eux et exploiteurs ; capitalistes quoi!
Il serait donc naturel que se construisent en Europe et dans le monde des mouvements solidaires avec les forces populaires Ukrainiennes et aussi Russes. Solidaire au sens de l’aide mais aussi parce que nous avons des intérêts communs au regard de ce que cette guerre révèle et permet.
Elle est l’occasion pour l’impérialisme occidental de tenter de reprendre la main alors que les Etats Unis ont dû quitter l’Afghanistan, la France le Mali… En Afrique annoncé comme marché émergeant, Russes et Chinois contestent la chasse gardée occidentale. De nouvelles puissances arrivent (Inde, Australie…) Et l’Europe tout en faisant de bonnes affaires avec la Russie découvre sa dépendance énergétique…
Cette guerre est donc une bonne occasion pour les Etats Unis de renforcer ses positions en Europe, notamment en récupérant une bonne partie du marché Européen du pétrole et du gaz, de schiste de préférence. Pourtant le boycott n’est pas facile à faire passer du désir à la réalité. Selon Bloomberg « les recettes de l’exportation de brut qui alimentent le trésor du Kremlin restent plus élevées qu’elles ne l’étaient avant la guerre. »
Pétroliers et gaziers se frottent les mains ; la demande mondiale de pétrole continue de progresser (voir graphique), Total vient de trouver un nouveau gisement au large de Chypre et s’active sur un méga projet d’oléoduc en Afrique, en Angleterre le moratoire sur la fracturation pour le pétrole et le gaz de schiste est suspendu… les affaires reprennent.
Oubliés les engagements de la COP 21 de réduction progressive des énergies carbonées, l’arrêt de la recherche de nouveaux sites, le climat de guerre est une aubaine pour pétroliers et gaziers. Cela d’autant plus que non seulement la demande progresse mais les producteurs et leurs financeurs excellent dans l’art de graduer l’offre pour faire monter des prix complètement déconnectés des coûts.
Selon Jayati Ghosh, professeur d’économie à l’université du Massachusetts la guerre en Ukraine et la reprise n’expliquent pas tout « La spéculation effrénée, menée principalement par des firmes financières comme les fonds d’investissement qui dominent les échanges, a beaucoup aggravée la situation. » l’article conclut « qu’une telle spéculation peut engendrer le chao. »
Certes la guerre n’explique pas tout mais elle permet à nos grands dirigeants du monde de justifier le chao. Ainsi Macron peut annoncer la fin de l’abondance. Mais peut-être est-ce plutôt la fin de l’ajustement automatique de l’offre et de la demande (la main invisible d’Adam Schmit).
Les spéculateurs utilisent désormais des outils marketings pour mesurer l’élasticité entre quantités et prix pour créer une pénurie, ou un sentiment de pénurie, qui aboutit à vendre moins mais plus cher sur les marchés les plus solvables.
Résultat, austérité pour les peuples et super profits pour les 1%. Pour cela nul besoin de complot, c’est le fonctionnement naturel de la fuite en avant du capitalisme.
Il serait temps d’arrêter de regarder ailleurs et pas seulement pour l’environnement.
Alain Lacombe
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