Horizons d'émancipations.

Une série de dossiers. pour mieux (se) comprendre.

N’oublions pas que le travail a le bras long !

Au soir du second tour des élections législatives la plupart d’entre-nous a poussé un soupir de soulagement tellement l’angoisse d’un gouvernement de l’extrême droite était forte. Mais ce soulagement passé, l’écoute des débats post-électoraux fait renaître ce sentiment d’angoisse tellement les commentaires semblaient ignorer le poids et la force recueillis par l’extrême-droite. Et si, jusqu’au moment où cet article est écrit, les différentes composantes du Nouveau Front Populaire ont toutes affirmé que l’enjeu était l’application du programme arrêté en commun, on entend tous, les voix appelant à un gouvernement des « gens raisonnables », compétents, un gouvernement excluant la France Insoumise et les mesures irréalistes.

Provoque aussi cette angoisse la conviction que nous sommes au bout d’un système, au bout de la démocratie délégataire, avec pour conséquence la montée de l’extrême-droite partout dans le monde, et des forces politiques qui envisagent de poursuivre comme si de rien n’était. Sans s’interroger sur ce qu’il adviendra à la prochaine élection si aucune réponse, aucune rupture n’étaient apportées.

Une dynamique à préserver, à développer

L’une des leçons de cette élection ne réside-t-elle pas dans la force et l’impact des mouvements sociaux, celui de l’engagement des syndicats, des associations, des mouvements féministes et anti-racistes… Sans cette dynamique qui a permis la création du NFP, la construction de son programme partagé, et l’implication dans les campagnes de terrain que serait-il advenu ?

Parmi les facteurs favorisant le renforcement de l’extrême-droite la question du travail et des conditions de sa réalisation ont été soulignées : face à l’autoritarisme, face à la négation du travail vivant, quand on perd l’estime de soi compte tenu des conditions d’exercice de son travail, alors on se réfugie dans le désespoir et la haine.

Quand la dictature des chiffres remplace la confrontation autour du travail réel et conduit à son ignorance, quand la sous-traitance en cascade substitue des prestations qu’on achète ou qu’on vend à l’activité des femmes et des hommes, quand cette même sous-traitance éclate les collectifs de travail, quand le management néo-libéral impose l’individualisation des situations, il détruit les collectifs de travail et dégrade la solidarité et la relation à l’autre. Comment alors s’étonner de la destruction de la solidarité, du lien collectif, de la fraternité ? Mais qui en parle hormis les syndicats ? Certainement pas ces technocrates issus des « business school » des écoles de commerces ou de management et qui appellent de leurs vœux un gouvernement de gens raisonnables !

Les rapports à l’autre, à la démocratie se construisent dans le travail

Oui la question du travail est centrale et elle ne peut rester en dehors des premiers actes d’un éventuel gouvernement du NFP.

Il est urgent de remettre en place les CHSCT, de renforcer leurs pouvoirs, notamment en les étendant aux entreprises sous-traitantes. Il est urgent de mettre en place des structures permettant aux salariés de discuter et d’agir sur les organisations du travail, voire sur les finalités de leur travail. En bref il est urgent d’introduire la démocratie au sein des entreprises, au sein des services publics, comme au sein de la fonction publique.

Développer les pouvoirs d’agir des salariés sur leur travail, sur leurs conditions de travail et sur les organisations, c’est aussi leur conférer une capacité d’action et d’intervention sur la finalité de leur travail, sur leur production et les services assurés. Mais n’est-ce pas aussi renforcer la capacité d’action d’un gouvernement du NFP sur la voie des ruptures nécessaires ?

N’est-ce pas aussi un pas vers cette nouvelle démocratie qu’il faut inventer, à tous les niveaux de notre société, une démocratie non plus délégataire mais participative. Car celle-ci passe aussi, et c’est urgent, par le monde et les lieux du travail. Alors n’oublions pas ce que nous dénommions l’autogestion, s’engager sur cette voie est plus nécessaire que jamais.

Olivier Frachon

Cet article fait partie du dossier :

Horizons d'émancipation

Et maintenant ? Tout reste à faire !

Au lendemain du second tour des élections législatives,  alors qu’aucune majorité cohérente ne se dégage à l’Assemblée Nationale, comment faire démocratie ensemble ? Le système politique ...
Partager sur :         
Retour en haut