Délicieux.

Articles courts à déguster à tout moment.

Vivre sans, une philosophie du manque

 Une critique acerbe de la société de marché ouvre cet ouvrage précis, parfois chirurgical, disputant quelques thèses, concepts et philosophes. Les amateur·rice·s apprécieront l’anthologie de la mythologie grecque.  

Opposer gestion et action, désarticuler réel et temps : le libéralisme et le consumérisme organisent et théorisent la société du manque. Un zéro manque aussi vain et dangereux que le risque de même occurrence… L’auteur dénonce la société de consommation qui donne de la valeur au ‘sans’, paradoxalement et vend non le produit mais son rêve et son image. Ce « sens » devient produit d’appel pour marketing et justifie prédation et productivisme. Être « sans » détermine une exclusion -de nombreuses luttes en témoignent- , parfois les pires atrocités. Parce que le tonneau est percé, il faut se procurer du vin en permanence…

« Je consomme pour oublier que je vais mourir » : Le progrès est devenu une croyance ; où l’on n’a nul besoin des autres. Ni de faire société. Le désir d’objets, sa quête incessante -quasi métaphysique- fait oublier que c’est l’économie qui produit les richesses. 

Chez Deleuze et Foucault, elle repère que leurs thèses sont digérables par le néolibéralisme malgré la critique qu’ils en font. Mais quels dominés ne sont AUSSI un élément du système de domination. Et le capitalisme en est ! La dignité échappe à l’évaluation, n’est donc pas intégrable dans le marché et voici qui peut refonder l’égalité. On n’est évidemment pas tenu de tout approuver mais l’ensemble est stimulant. 

Patrick Vassallo

Mazarine M. Pingeot, Vivre sans, une philosophie du manque, Climats, 2024, 272 pages, 21€

Partager sur :         
Retour en haut