Délicieux.

Articles courts à déguster à tout moment.

L’Odyssée de Pénélope

Donner la parole à un personnage féminin « secondaire » est très à la mode actuellement. Et hop, on renverse les rôles traditionnels dans les contes de fées. Ou bien, on raconte la mythologie du point de vue d’Hécube, de Circé, de Galatée… C’est plaisant. Ça fait féministe. Ça désacralise tous ces héros bien virils. Et – dirai-je – ça se vend bien. Mais, au-delà du commercial, on se demande parfois ce que ces réécritures apportent réellement à la littérature. 

L’exercice n’est pas nouveau : Ovide, au premier siècle, aurait inventé le concept. Ses Héroïdes, lettres fictives adressées à l’amant absent, explorent les regrets d’Ariane, la colère de Médée, la rancœur de Didon…  Alors, a-t-on besoin de se réapproprier les grands textes – masculins – de l’antiquité ? De se revendiquer une ascendance héroïque féminine bafouée ?

Mais la Pénélope de Margaret Atwood est d’une autre trempe. 

La voilà aux Enfers. Et elle raconte. Au premier abord, elle paraît bien innocente. Mais elle l’avoue volontiers : depuis toute jeune, elle aime mentir. Ce qu’elle nous dit est-il vrai ? Est-elle aussi vertueuse que le Moyen Age chrétien nous l’a vendue ? D’autant que le chœur des servantes, pendues par Ulysse et Télémaque, avance une autre version… jusqu’à lui donner une dimension sociologique peu étudiée. Et pour le coup, résolument féministe. 

Un texte bref, érudit, qui monte en puissance et donne envie, une fois terminé, d’en repasser la trame… pour en détisser patiemment les nœuds. 

Alexandra Pichardie

L’Odyssée de Pénélope, Margaret Atwood, (2005), Éditions Poche Pocket mai 2022, 208 pages, 8,50 euros 

Partager sur :         
Retour en haut