Esprit de suite et d'exploration.

Quand les articles du journal font réagir.

Esprit de suite et ouverture au présent…

 « Reste à définir ce qu’est une révolution ? Tout un programme… ». Bénédicte Goussault[1] a conclu par cette provocation, un encouragement à ne pas rester en retrait de la question posée !                                                           Essayons[2]  une analyse qui éclaire la situation. Supposons que se soit produite une « révolution scientifique et technique », du temps des « deux blocs », aux données chiffrées impressionnantes[3].  Pour l’URSS de Khrouchtchev et le Plan français (1964), la semaine de 30 h se profilait à l’horizon de dix ou vingt ans. Certes, les dirigeants de la classe dominante ont bifurqué de cette pente[4].

Cependant, nous vivons, depuis des dizaines d’années, une situation nouvelle entre machinisme, science et loisir créateur : en incorporant l’ensemble des travailleurs dans leur diversité, « la production de richesse est sans commune mesure avec le temps de travail que coûte la production (…) C’est la combinaison de l’activité sociale qui apparaît en fait comme le producteur » (Marx, Grundrisse, éd. Soc., 1980). L’ère de l’automation, celle du general intellect, implique, selon Marx, de passer à un rapport de forces qui ne peut se borner à défendre la valeur du salaire.

Un retard immense !  Changer la rétribution du travail est d’actualité dans les pays industrialisés : un pas de côté à l’égard de la domination salariale, de nouvelles règles, des buts communs.  D’où ces objectifs : le droit au salaire, égalité femmes-hommes, le droit au travail et à la formation toute la vie, pour toutes et tous.

Sans cette réforme, avec la mise en concurrence des salarié·es, ruineuse pour les droits sociaux, le progrès technique est générateur de chômage et le sera de plus encore de ségrégations ; la classe dirigeante veut faire croire que des êtres humains sont inemployables, incapables de « s’adapter ». Pour désorienter : robotisation, vaut damnation…

La révolution, c’est l’émancipation collective contre ce qui est insupportable, en s’appropriant les possibilités accaparées par une minorité : viser  « l’égaliberté » [5], une rupture avec « l’économique politiquement dominant », car il vient contredire « une tradition selon laquelle l’égalité (qui n’est pas l’uniformité) est à la fois un principe fondateur et un objectif “imprescriptible” de la politique ». Une liberté collective, une  puissance de pouvoir accomplir par soi-même avec ses semblables.

Le tableau de la « barbarie » contemporaine peut prendre fin : la précarisation générale comme la catastrophe écologique, les chefs néo-fascistes et les souverainismes racistes, sexistes et « populistes »… Les capacités individuelles et collectives des êtres humains sont plus grandes que jamais, avec une révolution démocratique, une autogestion généralisée. Cette histoire s’écrit toujours « en retard », au futur antérieur. Elle peut « commencer » aujourd’hui. .

Pierre Cours-Salies (13 mars 2020)


[1]Cerises (février 2020)

[2] – En peu de place, quitte à ajouter,  sur le site de Cerises notamment, un autre article plus long.

[3] – Avec la cybernétique et les techniques d’automatisation développées pendant et après la guerre de 1939-1945, on a noté une progression des productions avec en moyenne un multiplicateur de douze à vingt, et même de cinquante ou quatre-vingt, voire de cent pour certains ateliers (Pierre Naville Vers l’automatisme social ? (1963), éd. Syllepse, 2016).

[4] – La différence entre avant 68 et ensuite la Trilatérale appelle attention (A la prochaine… Chap. 2, 9, 10.)

[5] – Etienne Balibar, Les frontières de la démocratie, p. 200, La Découverte, 1992  

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