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DURALEX repris en SCOP par ses salariés

C’est près d’un mois après la présentation des projets de reprise de la célèbre usine de verrerie Duralex que le Tribunal de commerce d’Orléans a décidé, le 26 juillet, de valider le projet de SCOP (Société coopérative et participative) présenté par la majorité des salarié·e·s.

La décision n’était pas certaine il y a encore quelques jours, d’autant que l’entreprise est en difficulté depuis une bonne vingtaine d’années, ayant connu dans cette période l’enregistrement de quatre dépôts de bilan.

La dernière crise que celle-ci a connu est, selon les possesseurs actuels de Duralex, due en grande partie à l’augmentation des coûts de l’énergie et à la baisse des ventes.

Le principal acquis de cette victoire est le maintien de l’emploi des 226 salarié·e·s, alors que les projets concurrents proposaient une forte diminution du nombre d’emplois.

Le soutien des collectivités territoriales, notamment de la Région Centre-Val de Loire et la Métropole d’Orléans ont été décisifs. Cette dernière a ainsi pris l’engagement de racheter le site de l’usine, pour un montant de l’ordre de cinq millions d’euros.

Il restait ainsi près de sept millions à trouver pour sécuriser la relance de l’activité. A ce stade, les deux tiers ont été récoltés, notamment via des prêts mis en œuvre par la Caisse d’épargne, le Crédit agricole ainsi que par des organismes financiers du mouvement des SCOP et des SCIC (SOCODEN) et de l’ESS (France active). Le complément devrait se réaliser progressivement dans les trois années à venir.

La construction du projet coopératif a également été complexe à mettre en œuvre et c’est grâce à la mobilisation de plus de 150 des salariés et à l’accompagnement de la Fédération des SCOP de l’Industrie et de l’Union régionale des SCOP et des SCIC que celui-ci a pu être élaboré collectivement.

Ce projet de transformation est soutenu par la CFDT, mais non par la CGT, dont le délégué syndical y était clairement opposé, préférant la reprise par un groupe industriel. Il semble que par ailleurs l’État était aussi favorable à la même offre de reprise par la société Tourres. Ce n’est pas très étonnant dans la sphère de la confédération montreuilloise, dont une partie des dirigeants n’est absolument pas favorable à la reprise d’entreprises en coopérative. On l’avait ainsi observé au début de la lutte des Fralib (devenus SCOP TI) : la fédération CGT de l’agro-alimentaire n’imaginait comme sortie de la crise que le rachat par un groupe capitaliste… Il avait été significatif que la Communauté d’agglomération avait à l’époque racheté les locaux de Fralib pour les louer à la coopérative.

La mobilisation des collectivités territoriales et des réseaux locaux a souvent été déterminante dans les reprises en SCOP par les salariés.

On a retrouvé aussi des points divergents au sein du réseau des banques de l’ESS, comme dans le mouvement coopératif. La crainte est sans doute de se faire reprocher d’avoir soutenu le projet de reprise dans le cas où celui-ci s’effondrerait dans les années à venir.

Mais tous semblent d’accord pour faire un bilan très négatif de la gestion de l’entreprise par les repreneurs précédents et constater que la dernière crise rencontrée ne peut se résumer à l’augmentation des tarifs d’électricité.

Le modèle économique de la SCOP proposé par les salariés paraît solide, mais tout est à remettre en œuvre, tant sur le plan commercial que technique.

Au-delà des soutiens financiers, c’est la mobilisation des travailleurs qui sera le premier outil de la reconstruction. Un accompagnement sur le fonctionnement coopératif sera sans doute nécessaire.

Tout n’est pas gagné d’avance, dans un système où le capital est le roi de la concurrence et de la compétition. Or à ce jour, le projet coopératif est porté tant par certain·e·s qui veulent améliorer et socialiser le capitalisme et d’autres qui y voient des expériences alternatives au capitalisme. Nous serons sans doute amenés à en reparler…

François Longérinas

Président de l’EMI, coopérative de formation aux métiers de l’information

Membre du bureau de l’UR SCOP Ile-de-France, Centre Val de Loire, DOM-TOM

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