Le capitalisme et davantage encore l’ultra-libéralisme ont réussi à nous voler nos imaginaires et à nous faire croire que nous sommes soumis aux lois du marché. Il me semble que la transition écologique apparaît comme une obligation pour les dominants entravant production, croissance et bénéfices, à laquelle ils répondent par des pseudos solutions technologiques (cf le livre Croissance Verte contre la Nature d’Hélène Tordjman). Quant aux plus démunis, elle peut être un souci secondaire quand se loger, se nourrir, se soigner constituent des préoccupations incessantes du quotidien. Alors qui s’en préoccupe ? Une petite frange de bobos et de réseaux alternatifs ? La réalité est peut-être plus complexe que cela.
Gilets jaunes, en grande partie conscients de la problématique écologique
Quand on prend le temps de parler aux gilets jaunes, on constate qu’ils sont en grande partie conscients de la problématique écologique. Mais, s’ils se sentent concernés par l’avenir de la planète, ces représentants de cette France rurale et périurbaine refusent de payer pour les turpitudes d’un système économique qui détruit l’environnement. D’autant que c’est ce même système qui est à l’origine de la désindustrialisation et de la dévitalisation des territoires, dont ils subissent depuis trente ans les conséquences en première ligne. De même, les jeunes sont également lucides et inquiets quant à l’état de la planète et l’inégale répartition des richesses.
En tant que paysanne impliquée à la Confédération Paysanne (co-porte parole régionale), je me nourris des mobilisations locales menées par des collègues, des réflexions et actions portées par notre mouvement international la Via Campesina regroupant des organisations paysannes du monde entier. Je suis également sensible à la convergence des luttes…
« Le peuple commande, le gouvernement obéit. »
Rencontres et expériences m’ont beaucoup touchée, ainsi de la rencontre avec 6 femmes zapatistes accueillies chez nous à la ferme. La région du Chiapas travaille avec obstination à son autonomie depuis 25 ans. La base de son système est l’assemblée de village (ou communauté) qui se fédère, avec d’autres assemblées, en commune dotée d’un conseil municipal dont les membres sont élu.e.s pour 2 ou 3 ans. Les communes autonomes envoient des délégué.e.s à l’assemblée générale de zone (région), laquelle désigne un “conseil de bon gouvernement” chargé de la mise en oeuvre des décisions collectives sur l’éducation, la santé, la justice… Ce dernier travaille avec le slogan “le peuple commande, le gouvernement obéit.”
« Une autre façon d’être au monde »
Progès social et transition agro-écologique ne sont qu’un seul et même projet, une seule et même ligne d’horizon car ils relèvent d’une autre façon d’être au monde, d’être en lien avec le vivant, humains et non-humains. Murray Bookchin explique que les problèmes écologiques sont des problèmes sociaux car si la nature devient de simples ressources naturelles, c’est que les gens sont considérés comme de simples ressources économiques. De même Jocelyne Porcher pense que “Nous, les animaux domestiques, la nature, ne faisons qu’un pour le capitalisme industriel et financier. Nous ne sortirons pas les animaux domestiques et la nature de leur condition sans nous sortir nous-mêmes de la nôtre. Notre destin est lié au leur. La manière dont on les traite dans ces marchés libéralisés et mondialisés est le miroir dont on considère les êtres humains quant à leurs droits sociaux dans cette mise en concurrence des peuples du monde”.
Soazig LE BOT, paysanne dans le Morbihan , impliquée à la Confédération Paysanne
L’intégrale de l’article est publiée en pages “Coopérative” ICI
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