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L’IA dans les neurosciences : Quels enjeux ?

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Une équipe de chercheurs et de médecins franco-suisse vient de réaliser l’inimaginable : faire remarcher un paraplégique. Le patient contrôle ses pas par la pensée, grâce à des implants connectés placés dans le cerveau et la moelle épinière. Cette expérience ouvre des perspectives considérables dans le domaine de la réparation des êtres humains. Mais certains idéologues et industriels parlent d’augmenter les capacités de l’humain au-delà de ses capacités naturelles. C’est le cas de La start-up Neuralink d’Elon Musk qui vient de recevoir l’accord des autorités sanitaires américaines pour tester ses implants cérébraux connectés sur des humains.

Nous ne sommes plus dans la science-fiction Ce qui ressemble à une nouvelle révolution est en marche. Elle peut ouvrir une ère de progrès considérable pour l’humanité, mais peut être également lourde de dangers. Il est donc urgent que les citoyens et les États ouvrent le débat sur ces questions. Je ne suis pas spécialiste de ces questions, mais elles m’interpellent en tant qu’être humain.

Un mouvement intellectuel « le transhumanisme » considère certains aspects de la condition humaine tels que la maladie, le vieillissement ou la mort comme indésirables, et les capacités intellectuelles et physiques actuelles des humains comme dépassées. Il prône l’usage des sciences et des techniques pour les « augmenter » les êtres humains. Pour certaines multinationales notamment américaines, ces « progrès » constitueraient une source de profits considérables et des possibilités de manipulations et de dominations démultipliées. Le transhumanisme peut séduire car Il porte une utopie : le dépassement de la condition humaine, un rêve des humains depuis toujours : le mythe de Faust et le pacte avec le diable enfin réalisé !

Cette instrumentalisation accélérée de cette révolution des neurosciences posent des problèmes économiques, sociaux, éthiques, voire religieux considérables. Je me limiterais à énoncer quelques-unes de ces problématiques.

  • Dans nos sociétés inégalitaires, permettre aux plus riches d’améliorer leurs facultés nous amènerait à une société à deux vitesses, avec d’un côté des « cyborgs » disposant de capacités intellectuelles et physiques supérieures, et de l’autre des êtres humains « classiques ». Ces derniers deviendront-ils des sous-citoyens, surexploités voire pire ?
  • N’est-il pas dangereux de vouloir perfectionner notre corps et nos facultés intellectuelles, alors que nous sommes en train de détruire nos sociétés et notre planète ?
  • Dans un monde aux ressources limitées, où trouver les quantités d’énergie et de matières premières nécessaires à cette révolution technologique ?
  • Avec une perspective d’immortalité, comment la croissance de la population mondiale sera-t-elle régulée ?
  • Avec la robotisation accrue, quid du travail ?
  • Une fois que nous serons devenus des « cyborgs », qui contrôlera nos implants ?
  • L’essayiste américaine Meghan O’Gieblyn met en garde : « l’IA développe souvent des compétences et capacités qui n’ont pas été anticipées par leurs concepteurs. Aussi, il est difficile de prédire comment elles transformeront le mondeSon plus grand danger politique est donc son opacité »… « Il y a quelques années, dans le Wisconsin, un homme a été condamné à une peine sévère. Lorsqu’il a demandé pourquoi sa peine de prison était aussi longue, on lui a répondu que l’algorithme l’avait identifié comme présentant un risque élevé pour la communauté. Lorsqu’il a demandé plus d’informations, personne n’a pu lui dire pourquoi l’algorithme avait pris cette décision»… « Même les personnes censées être responsables ne comprenaient pas comment il fonctionnait, ni pourquoi elles faisaient ce qu’elles faisaient ».
  • Les transhumanistes pensent que notre conscience serait une propriété de l’interaction entre les neurones : Autrement dit, le cerveau produirait la conscience. Or si le cerveau est le substrat matériel de l’activité mentale, les pensées naissent des relations et expériences intrapsychiques et intersubjectives du sujet avec le monde extérieur. Quid de ces relations ? Que resterait-il de de notre part d’Humanité ? de notre libre-arbitre, du bonheur ?

 

 

Sujet sur l’IA pouvant faire l’objet d’un autre article :

L’Union européenne prépare un texte qui se veut particulièrement ambitieux : le règlement « établissant des règles harmonisées concernant l’intelligence artificielle », ou l’« IA Act ». Son but est de fixer des règles générales communes à l’ensemble des États membres afin d’encadrer les technologies faisant appel à l’intelligence artificielle (IA), comme la biométrie, la notation automatisée, l’analyse comportementale ou encore les algorithmes prédictifs.

Josiane Zarka

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