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Haine, mépris et violence de classe

C’est ce qui caractérise le pouvoir d’État. Au service du patronat, des actionnaires, des exploiteurs, le gouvernement n’en peut plus de ce mouvement social qui dure depuis deux mois et demi. A ce jour, la grève n’est pas assez puissante, pas assez généralisée pour le faire céder. Elle est suffisamment présente sur l’ensemble du territoire pour créer un climat de lutte ; d’autant que les manifestations rassemblent toujours un nombre considérable de personnes. Y compris sur le plan institutionnel, le pouvoir en place est en difficulté : faute de majorité au sein de l’Assemblée nationale, il recourt, pour la centième fois sous la 5ème République à l’article 49-3 de la Constitution. Un article aux effets magiques : à chaque fois qu’il est utilisé, une partie des député∙es opposé∙es au projet de loi alors en discussion refuse de censurer le gouvernement, seul moyen que le texte ne soit pas considéré comme ayant été approuvé. L’artifice du 49-3 a beau être bien connu, il énerve à chaque fois… Cela dit, pas un seul gouvernement de gauche depuis 1981 n’a entamé le processus pour l’abolir.

Revenons-en aux manifestations : de plus en plus acculé, le gouvernement a décidé de franchir un cap dans la répression. La violence policière se déchaîne. C’est une violence d’État, contre les travailleurs et les travailleuses, contre la population, contre les meutes comme on dit chez ces gens-là. Manifestations interdites, utilisation d’armes de guerre, provocations, arrestations violentes et sans le moindre fondement, tout y passe. Ce n’est pas sans conséquence : le 23 mars, à Rouen, une manifestante a eu un doigt arraché par une grenade ; à Paris, un manifestant a perdu un œil à la suite du jet, par la police, d’une grenade de désencerclement. Deux exemples parmi d’autres.

Sébastien est cheminot ; depuis plus de 25 ans, il travaille et milite à l’atelier TGV de Villeneuve, dans le Val-de-Marne. Le gouvernement et sa police l’ont mutilé d’un œil. Sébastien anime la section syndicale SUD-Rail de son établissement : 92% des voix aux élections dans le collège Exécution, 73% dans le collège Maîtrise. Qui, parmi celles et ceux qui veulent nous imposer leur loi, peut revendiquer une telle assise démocratique ? La mutilation de manifestantes ou manifestants est effroyable quelle que soit la victime, bien entendu. Mais cette indication à propos de Sébastien a pour objet de montrer, une fois encore, la grande hypocrisie de leur « démocratie » bourgeoise. L’arrivée massive des jeunes marque aussi le rejet d’un système représentatif jugé intrinsèquement lié à la surdité des gens en place. 

La colère populaire est très forte. La haine de classe qui se traduit par les violences policières, le mépris de classe qui ressort des attitudes et propos (les meutes » pour parler du peuple qui manifeste) ne font que la renforcer. Une fois de plus, preuve est faite que les mouvements sociaux créent de la politique, sont politiques et n’ont pas besoin de « débouchés » extérieurs à eux. Le meilleur débouché politique, c’est que la lutte soit victorieuse. La dynamique alors enclenchée sera porteuse de changements radicaux.

Christian Mahieux

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