Le gouvernement a tenté de justifier sa réforme des retraites en invoquant ses besoins de financement, sans pour autant augmenter les prélèvements obligatoires. C’est selon lui ce qui justifierait de repousser l’âge légal de départ à la retraite et d’allonger la durée de cotisation afin de bénéficier d’une pension de retraite à taux plein. Le financement est donc une question centrale, d’autant plus qu’il est de plus en plus complexe du fait des transferts financiers entre l’État et la Sécurité sociale.
Pour rendre cohérentes les propositions qui nourrissent le débat, il importe de définir les lignes de fond des systèmes de retraite (1) pour que les propositions s’inscrivent dans le cadre fixé (2).
1/ Quelle architecture du financement ?
Les prestations de la branche vieillesse de la Sécurité sociale sont essentiellement contributives. Mais l’État y participe cependant pour compenser les allègements de cotisations sociales qu’il a lui-même décidé d’instaurer. Les impôts viennent ainsi nourrir le financement du système par répartition, et financent également les régimes de retraite des fonctionnaires. Il alloue par ailleurs des subventions d’équilibre de l’État aux régimes spéciaux de retraite de la SNCF, de la RATP, des mines, des marins et des transferts provenant de la branche famille et du fonds de solidarité vieillesse en vue du financement de droits et de prestations de retraite à caractère non contributif.
En toute logique, s’agissant de la branche vieillesse, les pensions de retraite nécessitent un financement par des cotisations sociales prélevées sur les revenus du travail. L’État pour sa part, doit continuer de financer les pensions de retraite qui lui incombent, celles des fonctionnaires notamment, tout en assurant le financement des prestations non contributives comme le minimum vieillesse.
2/ Quelles mesures ?
Le financement des prestations contributives doit reposer sur les cotisations. Pour cela, on peut procéder à une hausse des cotisations et revenir sur les allègements de cotisations sociales. Les « niches sociales » représentent en effet un manque à gagner de 84 milliards d’euros, dont 18,39 milliards pour la branche vieillesse. Revenir sur ces niches est nécessaire : outre le manque à gagner qu’elles engendrent, elles n’ont pas produit les effets escomptés sur l’emploi et créent des trappes à bas salaires.
L’impôt doit, pour sa part, continuer de financer les prestations à caractère universel versées par le fonds de solidarité vieillesse ainsi que les pensions de retraite des fonctionnaires par exemple. Ceci justifie de mettre à contribution toutes les richesses dans le cadre d’une réforme fiscale globale et d’une lutte résolue contre l’évasion fiscale. Ajoutons que pour certaines prestations (indemnités journalières, pensions d’invalidité, retraites…), il existe un plafond de la Sécurité sociale qui confère un caractère dégressif aux cotisations concernées et qui mériterait d’être remis en cause.
Tout cela doit s’accompagner d’une revalorisation des salaires, d’une stricte égalité salariale entre femmes et hommes et d’une réduction des inégalités de revenus. Financer les systèmes de retraite est possible. Reste posée la question de la volonté politique.
Vincent Drezet porte-parole d’Attac
- Une prestation contributive est versée à condition d’avoir cotisé. Une prestation à caractère universel est versée sans condition de revenu.
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Observatoire de la justice fiscale, « 200 milliards d’euros de niches fiscales et sociales, pour quelle efficacité ? », 28 janvier 2022.
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Réévalué chaque année au 1er janvier en fonction de l’évolution des salaires (pour 2023, il est fixé à 3 666 €).
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