Ne réduisons-nous pas trop les problèmes de budgets de la culture aux seules dimensions financières ? Comme si le seul souci des réactionnaires était d’économiser sur ce qu’ils pensent superflu. Bien sûr c’est le cas mais il y a plus grave. On réduit trop la culture, les arts à la notion de loisir voire de luxe pour intellectuel·le·s. Mais la culture c’est la liberté de penser autrement que ce que « on » nous dit qu’est la réalité. Dès lors elle est au cœur des combats pour s’affranchir de l’ordre établi. Les premiers peintres à la fin de l’ère médiévale qui ont eu l’audace de mettre en avant les lois de la perspective ont fini sur le bûcher : ils mettaient en cause l’imagerie issue des vitraux et l’immuabilité du réel. Molière, La Fontaine, prennent des libertés audacieuses avec les représentations qui font se soumettre aux puissants. Ils sont héritiers du Roman de Renart. Le « je pense donc je suis » de Descartes éloigne le moi de la volonté divine. Et Lavoisier qui dit « rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme » … La Révolution française ne sort pas des Lumières par coïncidence. Quant aux surréalistes, ils nous disent que l’image qu’on nous présente de quelque chose n’est pas la chose elle-même. On comprend pourquoi Goebbels disait « quand j’entends le mot culture, je tire mon révolver ».
Au moment où on nous présente le monde comme anxiogène, insaisissable et combien nous sommes impuissants, nous, sommes-nous libres de nous représenter la réalité autrement ?
Pierre Zarka
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