Les journées d’action sont massives et dépassent la seule addition des forces syndicales. Le fait que des hommes politiques de droite, comme François Bayrou, demandent la taxation des superdividendes ou que des familles parmi les plus riches proposent la taxation des méga-fortunes lors du forum de Davos dit que lorsque le vent souffle fort d’en bas, ça tangue en haut. On l’a vu à propos du vote devenu majoritaire à l’Assemblée nationale sur la renationalisation d’EDF où le PS, dont on connaît la faible dose d’anticapitalisme, a été conduit à bouger. Le groupe macroniste a préféré quitter l’hémicycle, révélant ainsi une formidable crise du système dit représentatif.
Les manifs et journées d’action regroupent de plus en plus de motivations : santé, salaires, coûts ahurissants de l’énergie, égalité femmes-hommes, dérèglements climatiques : toutes se heurtent au même obstacle et commencent à chercher des solutions alternatives. Ce mouvement ne peut-il pas déplacer le centre de gravité de l’affrontement vers une mise en cause plus explicite du système qui le provoque ? Est-il normal que seul le travail participe financièrement à la protection sociale ? Les revenus financiers du capital sont de fait exonérés de toute contribution. Les actionnaires du CAC 40 vont se répartir plus de 150 milliards net. C’est une manière légale de taper dans la caisse de la collectivité. Le gouvernement a écrit noir sur blanc dans le programme de stabilité 2022-2027 que le but réel de sa réforme était de compenser la suppression des cotisations des grandes entreprises sur la valeur ajoutée. On touche à la conception de la société : est-il acceptable que les milliardaires ne contribuent pas à ce qui est vital ? Les un/es travaillent et produisent, les autres ramassent. Derrière cette question, il y a aussi celle de qui a le pouvoir de décider du sort de toutes et tous. Étrange discours sur la démocratie : le gouvernement reconnaît que les ¾ des gens s’opposent au projet « MAIS lui, il a été démocratiquement élu, et ce sont les gens qui ne comprennent rien ! »
« Je ne veux pas gâcher ma vie à la gagner » peut-on lire sur des pancartes. Cela nous ramène à la rengaine de la « valeur travail ». Lorsque des enseignant/es s’occupent d’enfants en bas âge, c’est reconnu comme une activité sociale. Mais lorsque des grands parents s’occupent des mêmes, cela ne le serait plus ? Les entretiens d’embauche portent surtout sur ce que les personnes ont acquis comme expérience hors emploi et hors formation technique – ce que le patronat appelle si élégamment les « compétences ». Quant à ce qui fait la richesse d’une société, ne confondons pas activité utile et emploi. Les activités des retraité/es disent combien est bénéfique pour toute la société l’allongement du temps passé en retraite et en bonne santé. D’où la retraite à 60 ans.
Afin de mutualiser et de sanctuariser les moyens pour répondre aux besoins de chacun/e on doit sortir la Sécu du budget de l’État (comme c’était le cas avant 1996) et en venir à une cogestion démocratique de représentant/es de cotisant/es.
Pour barrer la route au projet gouvernemental, réclamons notre droit à la parole politique. Ne faut-il pas mener campagne pour réclamer un référendum ? Comme étape de combat permettant le passage de toutes et tous à l’expression politique. La démocratie et l’expression politique ne doivent pas être réservées aux parlementaires. Ces ¾ de la population doivent être considéré/e s comme actrices et acteurs politiques ayant accès à une expression qui ait force de loi. Nous ne sommes pas citoyen/nes que le temps d’une élection. La démo-cratie c’est l’exercice du pouvoir par le peuple.
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