Horizons d'émancipations.

Une série de dossiers. pour mieux (se) comprendre.

Bernard Friot nous invite à « prendre le pouvoir sur nos retraites »

Slogans et pancartes soulignent le refus de travailler encore plus longtemps pour enrichir les actionnaires, l’impact du travail sur les corps et les esprits, le refus de perdre sa vie à la gagner. Des slogans qui traduisent un refus du travail tel qu’imposé par le capital. Dans son dernier ouvrage, Bernard Friot nous invite à sortir du cadre dans lequel nous enferment les débats qui envahissent la médiasphère sur le financement des retraites, à sortir de la « pensée religieuse capitaliste » instaurant le salaire comme contrepartie du travail, pour regarder la retraite comme un « déjà là communiste » libérant le travail et les humains de la domination de la bourgeoisie.

D’après lui, si les classes dominantes s’obstinent depuis des décennies à des contre-réformes sur les retraites, ce n’est pas pour contester le partage de la plus-value entre capital et travail, « conflit sévère mais contradiction non antagonique », parce que ne remettant « pas en cause l’existence de la classe dirigeante qui impose sa définition et sa pratique du travail ». Faire du conflit sur la retraite un conflit antagonique demande de la considérer comme « un conquis du salaire de la libre activité à généraliser à tous les majeurs, pour ôter à la bourgeoisie son pouvoir sur le travail, et donc sur l’argent ».

Et d’après lui, c’est parce que les batailles précédentes ont été menées sur le terrain des « réformateurs » de la retraite de Croizat qu’elles ont été perdues. L’enjeu ne réside pas entre capitalisation ou répartition (la capitalisation est marginale dans la plupart des pays), ni dans la répartition de la plus-value dans son financement, ni encore dans la durée de cotisation versus niveau de pension, mais dans la conception même de la retraite : salaire continué des travailleurs ou salaire différé en  fonction des cotisations versées au cours de la carrière professionnelle (contributivité). Et de proposer de prolonger le geste de Croizat supprimant le lien entre niveau de la pension et somme des cotisations en ramenant la pension à 100 % du salaire net des 6 meilleurs mois sans condition de carrière. «  Seul le travailleur étant producteur de la valeur, son salaire ne doit être conditionné par aucun préalable en matière de production de valeur ».

La lecture de ce manifeste est stimulante car, d’accord ou non avec Bernard Friot, les débats qu’il ouvre sur le salaire – à la tâche ou attaché à la personne, préalable ou conséquence de la création de valeur – ou sa proposition de retraite à 50 ans pour commencer à libérer le travail de la subordination constituent des pistes pour imaginer le dépassement du capitalisme.

Prenons le pouvoir sur nos retraites, Bernard Friot, Éditions La Dispute, Février 2023, 112 pages, 8 euros

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