Le premier vendredi après la chute du régime, les syriens ont célébré « la fin de l’éternité », dans ce pays « commandé pour l’éternité » par Hafez Al Assad de 1970 à 2000 et son fils Bachar jusqu’en 2024.
Hafez savait écarter ses rivaux en les éliminant (par exemples la gauche et l’OLP au Liban en 1977-83) ou en les plaçant sous contrôle, (comme les Kurdes du PKK jusqu’en 1998) tout en pratiquant des alliances variables avec les Soviétiques puis Russes, les Iraniens, les Américains, les Turcs, et en respectant un modus vivendi avec les Israéliens permettant à la Syrie de largement contrôler l’essentiel du Liban jusqu’en 2005. Son fils Bachar s’est efforcé de suivre cet exemple, (recevant à ce titre les honneurs de la République française le 14 juillet 2008).
Sur le plan intérieur le régime n’a jamais disposé d’une base sociale large, même s’il a imposé sa « protection » aux minorités et qu’avec « l’ouverture » capitaliste des années 1990, composé avec la bourgeoisie sunnite d’Alep. Il a donc régné par la terreur, contre la gauche syrienne et les Frères musulmans puis toute la société. Devant la révolte du « printemps arabe » de 2011 il a répondu par l’écrasement du pays, n’y parvenant que grâce à l’appui des Iraniens, du Hezbollah, des Russes et l’opportunité fournie par le développement des djihadistes, lui permettant de bénéficier d’une bienveillance occidentale… jusque dans une certaine gauche française.
Une alternative politique libérale-démocrate, n’a pu se constituer en exil, du fait des divisions internes, des pressions américaines, turques et des pétromonarchies, et aussi de la passivité des progressistes européens vis-à-vis de leurs homologues syriens.
Très naturellement c’est la plus organisée des forces intérieures, les islamistes du HTC, qui a porté le coup de grâce. Ce nouveau pouvoir est encore loin de contrôler tout le pays, même s’il semble répondre à la volonté des syriens de pacification et de coexistence.
Il faut aider les syriens et les syriennes à reconstruire leur avenir : aide humanitaire d’urgence, aide politique aussi et donc devoir des gauches françaises et européennes d’agir tout de suite :
– Contre l’attitude de nos États précarisant la situation des réfugiés, plutôt que de leur permettre des aller et retours avec leur pays afin de préparer un retour reconstructif
– Contre les ingérences étrangères et d’abord les bombardements et emprises territoriales des forces israéliennes en Syrie et les attaques turques contre les zones Kurdes et les zones gérées par les Forces démocratiques syriennes dans le nord.
Bernard Dreano
Président du Centre d’étude et d’initiative de solidarité internationale CEDETIM
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