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Destitution Game en Corée du Sud

En ce moment, deux catégories de personnes regardent de près la Corée du Sud. Les fans de Squid Game dont la nouvelle saison, fort attendue, vient de sortir sur la plateforme Netflix. Et puis, les passionnés de géopolitique. L’un n’empêchant pas l’autre…

Laissons de côté la vague Hallyu pour observer le tsunami initié par la tentative d’auto-coup d’état du président Yoon Suk Yeol.

En 2022, la Corée du Sud élisait, d’une très très courte tête, un ancien procureur ultra conservateur, anti-féministe assumé – il s’était engagé à supprimer le ministère de l’égalité des sexes, sans y réussir ensuite –  et souhaitait entre autre, allonger la durée du travail hebdomadaire de 52 heures à 69 heures, tout en supprimant le salaire minimal…

Dans son discours d’investiture, le 10 mai 2022, il jurait « solennellement de faire tout ce qui était en (son) pouvoir pour faire de la Corée un pays qui appartienne vraiment au peuple » (Citation traduite du site Korea.net). Une fois au pouvoir, pourtant, la liberté semble prendre un coup dans l’aile : censure de la presse, perquisitions dans les locaux de la Confédération Coréenne des Syndicats (KCTU), hostilité pour les mouvements ouvriers, scandales… Jusqu’à ce qu’en Décembre dernier, ne disposant d’aucune majorité à l’assemblée, et ayant subi une lourde défaite aux législatives, il laisse le pays sans budget pour 2025 – toute ressemblance avec une situation autre serait purement fortuite !

Dans la nuit du 3 au 4 Décembre, il décrète la loi martiale. Bravant la suspension du parlement et l’interdiction de rassemblement, dans un mouvement commun, plus de 200 000 personnes descendent dans la rue et réclament sa destitution pendant que les députés de l’opposition enjambaient les grilles du parlement.

Les membres du Syndicat Coréen des travailleurs des Services et Transports Publics (KPTU), au cœur du mouvement de masse contre le gouvernement, déclarent une grève illimitée pour dénoncer la situation, mais aussi les abus de pouvoir du ministère de l’économie et des finances. « Yoon Suk Yeol s’en prend, disent-ils, aux services publics et au droit du travail depuis son entrée en fonction » Toute ressemblance… « Dans le contexte actuel, la grève prend une nouvelle dimension en rattachant les difficultés des travailleuses et travailleurs à la nature antidémocratique du gouvernement Yoon ». (source : itfglobal.org). La réaction populaire est immédiate et le soutien s’organise : ceux qui ne peuvent pas manifester offrent repas ou boissons chaudes grâce à un hashtag lancé sur internet.

Deux tentatives de destitution plus tard, c’est au tour du premier ministre Han Duck Soo, président par intérim, d’être destitué à son tour après avoir été soupçonné de vouloir influencer la décision de la Cour constitutionnelle, qui dispose maintenant de 180 jours pour infirmer ou confirmer la destitution effective du président.

A bien y réfléchir, Yoon Suk Yeol a involontairement réussi à rendre au peuple son pouvoir… Et la jeune démocratie coréenne semble en passe de donner quelques leçons politiques à notre pays, pourtant historiquement révolutionnaire. Saurons-nous en prendre de la graine ?

Alexandra Pichardie

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