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Quand les articles du journal font réagir.

Révolution écologique ? (Suite)

Gaëlle Rougier maire-adjointe à Rennes, militante d’EELV, a bien voulu réagir au dossier du numéro de Cerises paru en avril. Noémie Brun quant à elle,  nous envoie une recension du livre paru aux Éditions La Dispute, Avoir 20 ans à Sainte-Soline. Le débat se poursuit.  

Pour une écologie populaire

Gaëlle Rougier 

Anthropocène ou capitalocène, quelque part ce débat m’intéresse peu car, quel que soit le terme, le préalable à l’action politique semble ici partagé : la société écologiste pour advenir ne nécessite pas seulement de transformer les modes de production et les technologies mais bien de renverser les modèles dominants et les hiérarchies sociales à l’œuvre. 

Penser l’écologie comme un objet social avant tout et intégrer les rapports de classes et les manières d’être au monde qui en découlent, les écologistes dont je suis, ont fait ce travail conceptuel depuis longtemps. 

La question est donc bien comment ?

Comment s’extraire du piège de la ritournelle sur “l’écologie punitive”, diffusée tant à droite par les milieux dominants, notamment économiques, qu’à gauche sur “les pauvres”, les gilets jaunes, le “peuple” qui seraient les perdants de cette écologie bourgeoise ? 

Si faire advenir l’écologie comme projet politique désirable n’est pas reporter la faute et donc la solution sur les seuls individus, ce n’est pas non plus les renvoyer à l’impuissance dans l’attente d’une solution qui serait exogène, extérieure à elles et eux. C’est au contraire leur redonner du pouvoir d’agir. C’est ça l’écologie populaire pour moi. Rendre les gens acteurs et leur redonner de la maîtrise sur leur vie et pour cela il faut qu’ils se sentent concernés.

C’est ce pouvoir d’agir des quartiers populaires par exemple que défend Fatima Ouassak et son syndicat Front de mères. Si elle n’épargne pas l’écologie politique d’EELV, force est de constater qu’au national, comme à Rennes, cette écologie de l’agir populaire converge avec ce que nous portons. Front de mères, Banlieues climat, Conscience, les mouvements d’écologie populaire fleurissent. Reste à ce qu’ils ne soient pas rattrapés eux-aussi par les fragmentations sans fin de la gauche aujourd’hui.

Les idées et le faire

Soazig Le Bot, nous dit, à juste titre, qu’il faut se libérer des imaginaires capitalistes et recréer les nôtres propres. Il est sûr que faire advenir une société écologiste, c’est lutter beaucoup contre de nombreuses représentations dominantes (du bonheur, du progrès humain, des relations sociales) et trouver ce récit collectif qui emmène le plus grand nombre, comme disent maintenant les communicants politiques.

Mais les idées changent-elles vraiment le monde ? Le philosophe dira que oui. Moi, j’ai une formation en sociologie politique. Comme Daniel Cueff je crois très fort en la transformation des mentalités et donc de la société par l’agir. Comme Antoine Barbier, je crois en l’éducation à l’écologie (en tant que projet politique subversif) et non l’éducation au développement durable qui ne remet rien en question ou si peu. Une éducation populaire, par l’agir, le faire ensemble, la pratique. 

En tant qu’élue à l’éducation, je travaille à une démocratie implicative des enfants, telle que l’a développée Daniel dans sa commune. C’est cette philosophie qui sous-tend le projet de budget participatif des enfants. On leur donne le cadre pratique, dont le cadre budgétaire, les valeurs qui nous animent (intérêt général, recherche de convergence, coopération, etc.) et on accompagne l’émergence des idées. Le plus difficile, comme le dit Daniel, est que les enfants, comme les adultes qui accompagnent la démarche, proposent des solutions selon leurs représentations déjà constituées. C’est cet aspect que nous travaillons désormais pour gagner en efficacité dans la transformation de la ville avec les enfants.

Laisser du pouvoir aux habitants, ce n’est pas renoncer au projet politique mais renoncer à l’hyper-maîtrise du processus de fabrique de la décision politique. C’est une révolution mentale à opérer mais qui est cohérente avec l’écologie populaire que nous voulons. Une pierre à l’édifice de la société écologique de demain.

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