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Moha, le retour du refoulé, Récits du racisme d’État

Retravaillant à deux voix les politiques migratoires dans l’histoire longue de la France et de la relation coloniale avec l’Algérie, les auteurs dévoilent un système qui travaille à ne pas accueillir et intégrer les immigrés, pour se laisser la latitude de les expulser facilement. Le récit de Mohamed Bridji, qui quitte l’Algérie à sept ans, et passe en Allemagne avant de connaître les foyers, la délinquance et la prison en France, raconte avec ses propres mots sa trajectoire migratoire jusqu’à son expulsion de l’autre côté de la frontière.

Il croise la route de Laurent Bazin à Oran en 2014, et tous deux nourrissent par une « rencontre de l’université et de la rue », l’ambition de connaître et de faire connaître la réalité crue de l’exil.

Du refoulement des étrangers depuis 1986 avec Pasqua et des campagnes de stigmatisation du « délinquant maghrébin » dès les années 70, l’approche anthropologique de l’un permet de restituer les cadres spatio-temporels et les moments politiques traversés par la vie de l’autre. Les auteurs reprennent à ce compte les nouvelles rhétoriques gouvernementales de lutte contre le « séparatisme » et contre « l’islamo-gauchisme », pour y révéler la répression permanente et jamais nommée de la France à son passé colonial en Algérie.

Travail scientifique autant qu’acte politique, ces témoignages espèrent « donner à voir comment la vie résiste aux pulsions de mort et aux ferments de la haine de l’autre que les gouvernements français successifs se sont efforcés de propager ».

Makan Rafatdjou

Moha, Le retour du refoulé, Récits du racisme d’État, Mohamed Bridji et Laurent Bazin, Éditions La Dispute, 2025,346 pages, 24 €

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