L’élection de Trump représente une étape clef dans le nouveau choix politique de la grande bourgeoisie mondialisée : favoriser des régimes autoritaires, en finir avec l’État social et l’État de droit hérité notamment du compromis capital/travail de l’après-guerre. Je ne défends pas l’État, mais il s’agit là de supprimer toutes les régulations qui freinent la marchandisation totale des sociétés. Le futur gouvernement de Trump composé de milliardaires et de dirigeants de multinationales, au mépris des conflits d’intérêts en dit long sur la volonté des élites de « privatiser » l’État et de piétiner les droits.
Par-delà la diversité des situations dans le monde, la similitude des objectifs est évidente. Les félicitations de Guillaume Kasbarian, ministre français de la fonction publique à Elon Musk sont éloquentes : “J’ai hâte de pouvoir partager nos bonnes pratiques dans la lutte contre la bureaucratie excessive et la paperasse et pour repenser les organisations publiques au bénéfice de l’efficacité des agents publics”. Ne nous y trompons pas, il ne s’agit pas d’en finir avec la bureaucratie comme ils le prétendent, mais avec les systèmes de redistribution des richesses et les services publics.
Ces régimes autoritaires ne sont pas seulement une réaction tournée vers un âge d’or des États-Unis et du monde mais une révolution systémique. Certes, ces dirigeants prétendent remettre en cause la mondialisation néo-libérale au nom de la préservation des normes et valeurs traditionnelles, mais ils s’inspirent en même temps des libertariens comme Musk, les principaux dirigeants du techno-pouvoir américain et l’argentin Milei. Pour ces derniers, toute activité humaine ne peut être qu’individuelle. « Il n’existe pas réellement de société mais seulement des individus qui interagissent. » (Thatcher reprendra cette formule). Si la société n’existe pas, alors il n’y a pas de droit de la société, ni d’intérêts communs ; L’État est donc illégitime. La propriété privée est un droit « naturel » qui doit être défendu au même niveau que les « droits humains ». Enfin, L’Égalitarisme est une « révolte contre la nature » car les inégalités de richesses, de genre, de race sont « naturelles ».
Bien sûr, il y a loin de ces projets à leur mise en œuvre. Chaque pays a sa culture politique et ses mouvements de luttes. Mais les rapports de forces dépendent aussi de la capacité des peuples à prendre la mesure de leur caractère destructeur.
Le plus préoccupant, c’est que la violence de Milei quand il vocifère contre l’État, « cette caste de voleurs », a fait mouche dans la population argentine paupérisée et exaspérée par la surdité des institutions. De même, les propos de Trump de « déporter » des millions d’immigrés en situation irrégulière, n’a pas empêché un tiers de ses électeurs issus de l’immigration de voter pour lui. Le reproche de Bernie Sanders au parti démocrate d’avoir abandonné les classes populaires pourrait aussi s’adresser aux forces de gauche de ce côté-ci de l’atlantique.
Mais ces régimes réactionnaires cachent une faiblesse : ils n’ont pas d’autres choix que de mettre en œuvre des solutions néolibérales qui ont perdu leur crédibilité, y compris chez une partie de leurs propres électeurs. Faute d’adhésion à leurs politiques, ils sont contraints de recourir à l’autoritarisme. N’est-ce pas l’aveu implicite que l’actuel ne peut plus durer ? Dans la recherche d’alternative, le capitalisme semble avoir pris une longueur d’avance. Face à cela DOIT-ON toujours nous contenter de dire non ?
Josiane Zarka
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