Au cours du travail autour de ce numéro de Cerises s’est ouvert un débat : pour les unes les hommes ne pouvaient pas être féministes parce qu’ils n’étaient pas en situation d’être dominés, pour d’autres il était nécessaire que les hommes soient aussi féministes c’est-à-dire soutiennent et participent à ces luttes émancipatrices …
Dès la création du MLF le problème s’était posé et « les groupes de femmes » des années 70 disaient avoir besoin de se retrouver entre elles avant d’affronter les hommes.
Cela nous renvoie à la question : qu’est ce que le féminisme (il était temps !!) question plutôt plurielle tant il y a de formes diverses de féminismes…
Le MLF en 1968 ouvre la voie et visibilise l’effervescence de nombreux mouvements féministes émergents à cette époque entre différentialistes, universalistes, intersectionnelles, et radicales…
L’histoire du féminisme marxiste illustre bien contradictions et débats avec les hommes entre lutte des classes et lutte des genres ; et sur la place du féminisme par rapport aux différentes luttes : contre les inégalités sociales, raciales (cf M. Dental et le réseau Ruptures).
On doit aux féministes des années 80/90 d’avoir ouvert les chantiers pour le planning familial, pour l’avortement, pour l’égalité entre hommes et femmes au foyer comme au travail et dans les instances du pouvoir politique et économique. Rassemblant largement autour des luttes et leurs acquis y compris avec les hommes qui ont participé activement aux mouvements tant individuellement qu’à travers associations et mouvements politiques.
Des hommes se sont fait connaître par leur participation au féminisme selon les époques : depuis Condorcet, A Crémieux, Victor Duruy, jusqu’à plus récemment Y Jablonka ou E Fassin.
B Cyrulnik, J Gaillot, A Touraine, S Hessel, P Bruckner, A Lipietz, Y Cochet, A Comte-Sponville, M Chebel, R Debray, PA Tagueiff sont signataires du manifeste Les chiennes de garde contre les injures sexistes à l’encontre des femmes.
Il semble que les mouvements féministes soient aujourd’hui plus fragmentés, à l’image des mouvements sociaux dans la société.
Les mouvements actuels #Me Too créé en 2007 et #balance ton porc mouvements de diffusion mondiale, dénoncent le viol, les agressions sexuelles et tous les comportements sexuellement inappropriés contre les femmes et les hommes, ainsi que l’impunité face à la police comme à la justice et posent la question du consentement.
Les féministes de tous bords se mobilisent aujourd’hui sur le grave problème actuel du harcèlement et du viol et « des mots pour le dire ».
Le viol collectif de Mazan, et la découverte des violences sexuelles dans tous les milieux : église, sport, media, cinéma, éducation renvoie à une prise de conscience collective de ce que la domination masculine et patriarcale et le rapport masculin au corps des femmes, chevaux de bataille des féministes depuis 1968, sont loin d’être dépassés au contraire. Ce qui n’est pas sans rappeler, sous d’autres formes, le combat de G Halimi en 1978 qui avait permis de criminaliser le viol.
Certes les places et points de vue sont différents et il faut souvent convaincre les hommes mais n’est ce pas la condition nécessaire pour qu’une société tienne sur ses deux jambes ?
Bénédicte Goussault
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