A l’heure où le jour et la nuit unissaient leur lumière et leur ombre[1], à l’heure où tu nous regardes depuis l’empyrée, nous pensons à toi depuis le nadir, depuis l’eau verte du canal du midi, depuis les murs en brique rouge du quartier des Minimes. 20 ans déjà que tu es parti comme une plume d’ange et tu as pris ton envol pour aller vers d’autres cieux. Toulouse et Armstrong résonnent toujours en moi, une émotion bruisse dans la clameur d’un soir de fête de l’Huma à l’espace midi. Alors je verrai peut-être ton stylo emplumé de soleil et tu verras tu verras tout recommencera jusqu’à la fin du monde. Ah ! cher Claude ta voix teintée de Garonne et d’accent que j’aime tant, ta voix nous manque tant alors je te donne ma main camarade, car je regarde ma ville, ta ville, elle s’appelle bidon, bidon, bidonville et même dans le bleu de la mer je verrai toujours la merde, bidon bidonville.
Le soir de mes fiançailles j’ai dansé sur toi, j’ai vu la voie lactée la voie clarté pour que nos cœurs s’encastrent et que la vie soit un feu d’artifice et la mort un feu de paille, un chant de cygne et ton chant du cygne ne s’est jamais éteint car un autre a cassé l’œuf sous un saphir, un vrai saphir, ce beau saphir que fut ta fille Cécile.
Incompris tu es parti pour New-York. Dans les starting-block à Blagnac tu as senti le choc, un souffle barbare de remous hard rock chez les amerlocs, mais solide comme un roc, tu nous as rapporté un merveilleux album façon jambon d’York. A la fête de l’Huma tu clamais que quand le jazz est là, la java s’en va, mais es-tu vraiment sûr qu’entre le jazz et la java il y a de l’eau dans le gaz, car pour moi jazz et java c’est du pareil au même, alors je me saoule sous, sous, sous le balcon de Marie Christine qui me laisse seul malgré mon cri à sa sourde oreille.
Alors cher Claude ! entre Toulouse et Tournay je reluque la locomotive d’or qui t’accompagne dans ton grand voyage. Cette locomotive, aussi chargée d’essieux que de siècles, locomotive comme un sépulcre, locomotive d’or qui traverse la campagne bordée de Garonne et de Baïse et dans la gare divine la locomotive d’or va souffler comme un enfant s’endort et ce soir l’église St Sernin s’illumine.
Daniel Rome
[1] Merci à Dominique Fernandez et Claude Nougaro et tous ses paroliers pour les emprunts qui ont permis l’écriture de ce texte
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