La coopérative de débats.

L’espace où vous avez la parole.

Ramallah, vendredi 10 novembre 2023


Jusque-là nous avions toujours la possibilité de passer par l’anglais ou d’avoir des traducteurs arabe-français et ça a encouragé notre paresse mais aujourd’hui tout va trop vite. Et puis surtout, maintenant plus que jamais, on voudrait tant pouvoir discuter avec les gens dans leur langue, comme une offrande, comme s’incliner devant leur extraordinaire dignité et leur formidable chaleur humaine. Nous sommes dans une famille qui, de manière générale, est hyper-protectrice mais là, dans la situation, c’est un véritable globe de verre qui nous protège : pas question que nous courions le moindre risque. Quand, eux, sont rongés d’angoisse et ont du mal à avaler quoi que ce soit, ils (elles surtout d’ailleurs) déploient des efforts insensés pour nous préparer les plats les plus succulents et être en permanence aux petits soins. Cette famille, nous l’avons connue il y a près de 30 ans, par l’intermédiaire de notre si chère N. qui fut une grande militante de la gauche palestinienne et une grande militante féministe. C’est elle et son frère aîné décédé en août dernier qui impulsèrent en grande partie la coloration politique de la famille, une famille laïque clairement ancrée à gauche. Il faut préciser que lorsqu’on dit « laïque », ici, cela peut vouloir dire athée pour certains, comme croyants pour d’autres (pratiquants ou pas). En tout cas, ce ne sont pas des gens qui placent la religion comme moyen d’action politique et qui sont profondément respectueux de tous et de toutes.


17 – Le partage de la Palestine en 1947 et la création d’Israël sont
des décisions illégales et artificielles quel que soit le temps écoulé,
parce qu’elles ont été contraires à la volonté du peuple de Palestine
et à son droit naturel sur sa patrie. Elles ont été prises en violation des
principes fondamentaux contenus dans la charte des Nations unies
parmi lesquels figure au premier rang le droit à l’autodétermination.

15 – La libération de la Palestine, sur le plan spirituel, annonce,
en terre sainte, une atmosphère de tranquillité et de paix, dans
laquelle tous les lieux saints seront protégés. La liberté de culte et
d’accès sera garantie à tous, sans discrimination de race, de couleur,
de langue ou de religion. Pour toutes ces raisons, le peuple palestinien s’attend à avoir le soutien de toutes les forces spirituelles dans
le monde. […]

7 – Les juifs d’origine palestinienne sont considérés comme des
Palestiniens pourvu qu’ils veuillent vivre pacifiquement et loyalement en Palestine. […]


qu’il n’y avait pas d’autre solution que de créer un État unique, donc forcément laïc, qui intégrerait le droit au retour pour tous les réfugiés qui avaient été chassés lors de la Nakba en 48. Ce projet d’un État laïc, regroupant toutes les religions, était également partagé par une partie de la gauche israélienne mais entrait forcément en opposition avec le Plan de partage décidé par l’ONU en 47 qui prévoyait un État « pour les Juifs » (Israël : 56 % du territoire) et un autre « pour les Arabes » (la Palestine : 43 % du territoire) : contradiction, dès le départ, avec d’un côté un État basé sur une religion et une culture et de l’autre un État basé sur une appartenance culturelle (et donc multiconfessionnel). Sous prétexte que ce projet aurait signifié la disparition d’Israël (image des Juifs à la mer) l’Occident a contraint l’OLP à abandonner sa charte : pour devenir respectable, il fallait accepter l’idée de 2 États… donc abandonner l’idée de la laïcité. Le Fatah d’Arafat l’a fait sans trop de problème, ce fut plus difficile pour la gauche palestinienne mais aussi une partie de la gauche israélienne. En échange, on promettait aux Palestiniens un État dans des frontières sûres et reconnues : il ne vit jamais le jour. Mais, de fait, la suppression de la charte de l’OLP contribua à placer la question religieuse au centre du débat politique. C’était mal augurer de la suite mais peu de gens semblèrent le remarquer à l’époque. Quoi qu’il en soit, face à l’urgence de la nécessité d’avancées, une partie de la gauche se rangea bon gré mal gré dans la nouvelle perspective créée : OK pour 2 États mais pas de colonisation des Territoires palestiniens. Or cette colonisation, combinée à des restrictions majeures d’autorisations de constructions pour les Palestiniens, est devenue galopante, impulsée dès le départ par les gouvernements travaillistes israéliens (qualifiés de « gauche » en France), renforcée par les accords d’Oslo, jusqu’à atteindre le chiffre de 500 000 colons en Cisjordanie et 220 000 à Jérusalem Est et, ce, malgré plus d’une dizaine de résolutions de l’ONU affirmant et réaffirmant la totale illégalité de la colonisation. Mais il n’y a pas que les colonies et leurs bâtiments, il y a toutes les infrastructures autour : zones dites « de sécurité », check-points, camps militaires, maillage hallucinant de routes interdites (ou difficilement accessibles) aux Palestiniens reliant les colonies entre elles, coupant parfois les anciennes routes traditionnelles permettant d’accéder aux villages et quadrillant totalement le territoire pour en assurer un contrôle complet, les attaques des colons (avec bien souvent le soutien de l’armée) et le mur de séparation de plus de 700 km pénétrant largement en territoire palestinien (seulement à peu près 20 % suivraient le strict tracé de la ligne d’armistice de 49 et 67 dite « ligne verte »).

Je pense que, de France, il est difficile d’imaginer ce que peut représenter la colonisation en Palestine. Souvent, l’idée qu’on s’en fait ressemble à ce que l’on croit qu’était la colonisation en Algérie par exemple : un pays en exploitant un autre, avec tout le cortège de racisme et de répression qui va avec, des populations autochtones privées de tout accès au développement, juste bonne pour le travail, etc. Pour la Palestine, il serait plus juste de rapprocher la colonisation de ce qui s’est passé en Amérique (peut-être est-ce d’ailleurs une des raisons qui explique un tel soutien à Israël de la part des USA) : une exclusion méthodique des populations natives de leurs territoires et leur éradication massive. Si l’exploitation de la main d’œuvre à bas prix d’une partie de la population palestinienne est une réalité, ce n’est pas cela qui constitue le cœur du projet sioniste : son objectif est l’appropriation de tout le territoire par tous les moyens et, en attendant, la pose de jalons rendant impossible la construction d’un État palestinien indépendant. L’occupation de la terre est donc un enjeu majeur mais, concrètement, comment cela se traduit-il ? Prenons l’exemple d’un paysan palestinien qui a hérité de terres appartenant à ses ancêtres depuis des générations et qui vit de la culture des oliviers. À proximité existe déjà un bloc de colonies de plusieurs centaines ou milliers de logements, un jour il voit des bulldozers arriver en haut de la colline qui lui appartient, en face de sa ferme, et y déposer des bungalows. S’il proteste, il est au mieux battu par les colons d’à côté et l’armée peut arriver en renfort pour le faire déguerpir. Immédiatement, la moitié de la colline lui est rendue inaccessible par des clôtures de barbelés. Un chemin est tracé, coupant le reste de la colline en deux, pour permettre aux véhicules des colons d’accéder à leur domicile. Installation de l’électricité, adduction d’eau, poste militaire… En aval de la clôture, ainsi que de chaque côté du chemin, une zone de sécurité (de 50, 100, 200 m) est définie dans laquelle il n’a plus le droit de pénétrer. Quand il va dans ce qui lui reste de champs, il se fait régulièrement attaquer, l’objectif étant pour Israël de déclarer ces terres abandonnées afin de se les approprier avec une apparence de légalité. Sa famille se fait quotidiennement insulter et agresser ; si, malgré tout, il persiste, les colons viendront lui voler ses récoltes ou bien ce sont ses arbres qui seront coupés ou incendiés, ses outils agricoles qui seront endommagés ou détruits ou volés, ses puits empoisonnés ou mieux obstrués, puis les fusils qui entreront en action. Au bout de quelques mois, des machines de chantier arriveront : les bungalows seront enlevés et des bâtiments en dur seront construits. La population de la colonie grossissant, la clôture sera déplacée vers le bas, les bâtiments arriveront sous ses fenêtres et la jonction sera effectuée avec les blocs de colonies voisins : bientôt il se retrouvera complètement encerclé, sans ressources pour vivre, avec les pires difficultés de déplacement, entouré de gens venus d’Europe ou d’Amérique proclamant que la terre (sa terre) leur a été promise par Dieu il y a 4000 ans.


si précieuse dans cet endroit du monde, est pompée dans les nappes phréatiques de Cisjordanie, distribuée en Israël et dans les colonies et revendue aux Palestiniens par la société Mékorot. Les accords d’Oslo (qui ne furent jamais, il faut le répéter, l’application du droit international) vinrent sceller la situation existante et permettre son développement. Israël se retirait du centre des villes, économisant ainsi des pertes en vies humaines et quelques deniers, et une autorité supplétive (l’Autorité palestinienne) était désormais chargée du maintien de l’ordre, en concertation avec l’armée israélienne. Le retour d’Arafat et de « ceux de Tunis » (les cadres de l’OLP) fut vécu dans un premier temps comme une petite victoire par le peuple palestinien, une sorte de premier pas encourageant (même si la majorité des forces de gauche était très sceptique). Indiscutablement, pendant une certaine période, les citadins purent souffler : plus de contrôles incessants ni de véhicules militaires dans les rues, plus de soldats postés sur les toits et balançant des caillasses sur les gens ou les tirant comme des lapins. Tout le monde se mit à investir : la communauté internationale, les pays arabes, la diaspora palestinienne (exemple : l’horrible ville nouvelle pour riches de Rawabi construite à l’initiative du millionnaire Al Masri… sur le modèle architectural des colonies!). Certaines associations de la première Intifada furent financées à fond, mais sous conditions : elles passèrent du stade de petites structures de résistance civile à celui de grosses ONG drainant des millions mais sous contrôle de l’Occident, via l’aval de l’Autorité palestinienne. À Ramallah, des immeubles ultramodernes tout confort sortirent de terre comme des champignons, au mépris de tout respect de l’environnement et du patrimoine ancien, et d’immenses châteaux en sucre agrémentés de palmiers abritèrent les familles les plus en vue. La ville devint une petite bulle occidentalisée tournant sur elle-même dans laquelle une partie de la jeune génération grandit à l’abri du besoin et des débats politiques, avec tous les jouets nécessaires à son divertissement (de divertere : détourner en latin). Mais, tout autour, la situation ne cessait d’empirer. Les terrains agricoles (richesse de la Palestine) étaient de plus en plus accaparés par les colonies, tout déplacement devenait compliqué et risqué, y compris d’un village à l’autre, les villes devenaient de plus en plus difficiles d’accès et, dans bien des endroits, c’est un régime basique d’autosuffisance locale qui se mit en place. Privés de tout accès au développement et en permanence confrontés à la violence des colons et de l’armée, il n’est pas étonnant que dans de telles conditions une partie de la population, hors Ramallah, se soit repliée sur des valeurs à sa portée : celles des traditions et / ou de la religion, dans un contexte devenu totalement insupportable. Indiscutablement, une forme de fossé se creusa peu à peu entre la Palestine rurale et sa brillante capitale économique, même si tout cela se déroulait sur un espace extrêmement petit, la taille d’un département français. Quant à Gaza, on sait ce qu’il en est avec ses 17 années de blocus totalement illégal. La Palestine était donc totalement grignotée, morcelée en une multitude d’îlots sans aucune jonction entre eux et clairement sous occupation militaire. Depuis bien longtemps, en 2023, plus personne ne parlait de la Palestine sur le plan international, oubliée, effacée de tous les calendriers. Mieux, Israël était en passe de normaliser ses relations avec les pays arabes, les accords d’Abraham mijotés par Trump devant leur assurer sécurité et débouchés commerciaux (tout cela, bien sûr, sans aucune concertation des premiers concernés, les Palestiniens). Malgré tout, dans ce tableau d’une extrême noirceur, deux miracles survivaient : la persistance, dans une situation d’apartheid, du sentiment national et le fait que celui-ci, malgré tout ce qu’avait subi son peuple, ne se teintait pas majoritairement de nationalisme xénophobe. Au-delà de la formidable tradition d’hospitalité du monde arabo-musulman (dont les racistes n’ont pas un millième de gramme de conscience!), et sûrement en partie aussi du fait de son Histoire ancienne et récente (carrefour de civilisations depuis toujours, brassages permanents de populations, diaspora palestinienne répandue sur la planète entière), la Palestine a longtemps été exemplaire en termes de tolérance et d’accueil. C’est ça aussi que ce qui se passe en ce moment à Gaza est peut-être en train de casser. Avec quel chagrin et quelle colère partagés nos amis et nous-mêmes sommes-nous aujourd’hui obligés de constater que, vraisemblablement, plus jamais rien ne sera comme avant.


nul doute que tous les camps vont y passer ! À Jénine, ce sont finalement 14 martyrs qu’ils ont enterrés ce matin. À Gaza les Israéliens, après avoir envoyé ces derniers jours des avertissements de plus en plus rapprochés sous forme de bombes tout alentour, ont lancé leur dernière injonction aux hôpitaux Al Shafi et indonésien : « Ou vous partez immédiatement vous, vos patients et les centaines de personnes qui ont trouvé refuge dans vos murs, ou ce sera tant pis pour vous ». Et, pour bien faire comprendre que ce n’était pas de la rigolade, ils ont joint le geste à la parole, endommageant les étages supérieurs et faisant quelques victimes au passage, sans pour autant détruire encore l’ensemble de la structure : la communauté internationale va-t-elle les remercier « d’avoir prévenu » ?

11 h 27, dépêche de l’agence Wafa : des obus d’artillerie ont détruit plusieurs pavillons externes de l’hôpital Al Shifa ainsi que l’entrée de l’hôpital pour enfants Al Nasr entraînant l’arrêt complet de tous les services, une ambulance a également été visée près de l’hôpital Al Awda, incendie dans l’hôpital pour enfants Rantisi.

16 h : toutes les personnes abritées dans les hôpitaux doivent les quitter, des dizaines ont déjà pris la route du Sud ; des bombardements sont signalés sur la route.

17 h : voilà, nous y sommes : dans une brume jaune de phosphore, dézingage méthodique de tout ce qui restait encore debout au Nord de la bande de Gaza, y compris des symboles de vie que sont les hôpitaux.

On en est à peu près à 18 000 tonnes de bombes sur la Bande de Gaza : 50 tonnes par km2. Tout va bien.

Tous ceux qui ont justifié ou se seront tus ou auront traîné des pieds pendant des semaines porteront la responsabilité devant l’Histoire.

Un génie fait de grands calculs

dans une grande université

Un autre trouve le bon engrenage mécanique

pour éviter tout grincement

Un autre découvre la longueur exacte

de fibre nécessaire pour glisser un œil

sur un grain de sable depuis la lune

Son collègue la parfaite connexion

entre le viseur et la gâchette

Celui de l’étage du dessus comment poser

une oreille sur chaque guéridon

de chaque appartement de chaque building

Celui de dessous comment déguiser

une vilaine grenouille en ange

De géniaux spécialistes coordonnent tout ça

et gavent le peuple de théâtralités

Les banquiers gèrent à merveille

les flux de généreux investisseurs

Les gouvernants gouvernent

Celui qui presse sur la gâchette

N’est plus qu’un gnome de l’Histoire

Le feu d’artifice peut commencer

Gaza gazée, Gaza égorgée, Gaza rasée

La guerre, la guerre, enfin la guerre !

La guerre géante, magnifique, totale

La guerre

ses dégoulinures de chiffres et de sang

et le silence tout autour

Répétition générale

Avant l’engloutissement général 

de notre petit globe ?

Tous se congratulent

ils ont si bien géré

la haine a si bien germé

les portefeuilles se sont si bien gorgés

Un chat efflanqué sort des ruines

à la recherche d’un Homme .

G fait un cauchemar ?


Cette nuit, l’armée est de nouveau entrée à Ramallah et dans le camp de réfugiés de Jalazon : arrestations, blessés. La routine, quoi.

À la manifestation d’hier à Manara, cette fois le Fatah avait anticipé : une énorme sono était installée et diffusait de la musique assourdissante en continu tandis qu’un camion, lui aussi équipé d’enceintes et de drapeaux jaunes, barrait la rue, bien décidé à prendre la tête du cortège. Brusquement, une femme se rend compte qu’il n’y a pas de drapeaux palestiniens sur le camion, elle va en chercher ; un gamin d’une douzaine d’années, portant un bandeau vert du Hamas, s’accroche au marche-pied, il est chassé. L’heure de la prière est finie, la foule devient dense, le camion jaune diffuse à fond son slogan « Un seul peuple, un seul peuple ! ». Il avance. Personne ne le suit, il recule. Dans la foule certains sourient du grotesque de la situation. Quelques drapeaux oranges du parti de Moustafa Barghouti se mettent dans l’espace libre entre le Fatah et tous les autres. Et puis, brusquement, la place commence à se vider : la queue de la manifestation est partie la première… mais dans la direction opposée à celle qui était prévue ! On sent un vent de désarrois sur le camion jaune et dans le groupe d’une quinzaine de personnes qui l’entourent. Mais la place est déjà vide : la foule, avec ses drapeaux palestiniens, ses drapeaux verts du Hamas et rouges du FDLP a décidé d’affronter l’occupation, elle marche vers le check-point d’El Bireh. Pour la première fois, on remarque la présence de quelques occidentaux, par contre, plus aucune trace des drapeaux oranges. Quand on revient vers la place d’Al Manara, le camion jaune est parti ainsi que ses supporters : le rond-point est rendu à la circulation.

Depuis 24 heures, les 4 grands hôpitaux de Gaza sont encerclés par les tanks et les snipers de l’armée israélienne qui bombardent et tirent, empêchant toute entrée et toute sortie. Plus aucune opération n’est possible, les morgues sont pleines, les corps sont laissés dans les rues. À l’hôpital Al Shifa, 39 bébés sont morts faute de ventilation.

Hier-soir, les petits-enfants de la famille étaient déchaînés, ils sautaient, couraient partout, répandant le contenu de leurs assiettes sur les divans. Ordinairement, ça ne rigole pas question propreté ni respect des consignes. « Khalas ! » (ça suffit!). À la télé, des images d’enfants morts ou blessés. Finalement, tout le monde fait le choix de rire des incartades des petits-enfants : ça fait tellement de bien de les voir faire autant de petites bêtises !

L’Assemblée générale de l’ONU vient d’adopter une nouvelle résolution réaffirmant les droits à l’autodétermination des Palestiniens : 168 voix pour, 5 contre (USA, Israël, îles Marshall, Micronésie, Nauru), 9 abstentions (Congo RDC, Guatemala, Kiribati, Palau, Papua Nouvelle Guinée, Paraguay, Togo, Tonga, Vanuatu). Ainsi, les USA qui possèdent le droit de veto au Conseil de sécurité (censé porter la voix de l’ONU) viennent de voter, une fois de plus, contre un de ses textes fondateurs : le droit à l’autodétermination des peuples. Et Israël, comme toujours, a voté contre les principes de l’ONU… à qui elle doit son existence ! Et, roule ma poule, la belle démocratie mondiale est à l’œuvre : au diable les majorités !

Les enfants et les petits-enfants de la famille partis, on se serre sur un coin du canapé devant un dernier café, face à la télé : images en direct de l’entrée de l’hôpital indonésien de Gaza, quelques rares personnes et des chiens abandonnés sur l’esplanade devant. Brusquement, des bruits de tirs et d’explosions. Panique, ça court dans tous les sens, impression de feuilles mortes soufflées par un grand vent, puis tout le monde fonce vers l’entrée de l’hôpital. Les chiens, affolés, tournent en rond un moment puis se précipitent, eux aussi, vers la porte et se blottissent les uns contre les autres dans une encoignure du porche. Personne ne les chasse.

Ce sera une des dernières images que je garderai de la Palestine en ce mois de novembre 2023.


le Président Macron, brusquement, ne trouve plus légitime que des femmes et des enfants soient bombardés et il demande un cessez-le-feu. « Messieurs, voulez-vous bien, s’il vous plaît, vous placer au centre, de manière à ce que les génocidaires puissent continuer leur travail et que l’on puisse qualifier les morts de femmes et d’enfants de « dégâts collatéraux ? ». Un petit cessez-le-feu, tout petit, afin que la guerre puisse reprendre son souffle et que la phase finale de l’extermination puisse reprendre son train, tranquillement, sous nos yeux morts ? Quant à la Cisjordanie, ses presque 200 tués depuis le 7 octobre, la quasi impossibilité de mettre un pied dehors pour circuler, Jérusalem, Israël, les chasses à l’homme, les tortures de prisonniers façon Guantánamo : ce ne sont peut-être que des détails de l’Histoire ? Comment peut-on rêver que ce qui vient de se produire sous nos yeux, sans que l’on lève le petit doigt, puisse nous préserver, que les peuples opprimés ne se dressent pas, là-bas comme en Occident, contre l’injustice et la barbarie ? Il y a toujours un prix à payer pour tout mais l’on peut aussi décider de changer de braquet. Et si, enfin, on raisonnait sur la base des faits et non des partis pris (idéologiques ou économiques ou géostratégiques), si l’on mettait en regard la réalité et les grands principes affichés, si l’on avait le courage de prendre les mesures nécessaires à leurs applications, si l’on voulait vraiment construire un monde de paix pour les enfants, tous les enfants, d’aujourd’hui et de demain ?

Demain, nous quitterons Ramallah pour la Jordanie, le soir nous serons en France.


dans chaque coin de notre cerveau, dans chaque pore de notre peau. Et dans notre souffle qui devra propulser la réalité et demander justice. Mais une part de tous ceux qui, sans être sous les bombes, se sont trouvés au bord du cratère de l’enfer est morte. Il va falloir être forts pour redonner du soleil à la vie.

Mais c’est ça aussi que nous demandent les Palestiniens et les Palestiniennes.

*

*

,

 

Partager sur :         
Retour en haut