A travers ces enquêtes et ces travaux – ceux des sociologues, ergonomes, philosophes et de tous ceux qui se sont penchés sur le travail humain et son organisation, l’organisation des entreprises mais aussi sur les évolutions successives du management – Danièle Linhart éclaire les stratégies du patronat pour asseoir sa domination sur les travailleuses et les travailleurs, transformant le travail humain en une prestation désincarnée et déshumanisée.
Du taylorisme qu’Henry Ford justifiait par le fait « que plus aucun travailleur n’ait besoin d’une compétence particulière pour exécuter une tâche » au management de l’entreprise ultralibérale, le patronat a régulièrement adapté l’organisation du travail face à la capacité collective des salarié-e-s : prolétarisation des activités, individualisation des situations, pilotage par les tableaux de bord.
Jusqu’à « l’entreprise libérée », visant « l’engagement total des salariés à la cause de l’entreprise » ou jusqu’aux théoriciens du management moderne qui professent la fin du salariat au profit des emplois indépendants comme voie d’émancipation !
Cette mise en perspective bienvenue sort de l’ombre ce qui constitue, sinon un impensé et un tabou, au moins un sujet régulièrement ignoré : le lien de subordination et le pouvoir absolu qu’il confère au capital.
Et si, plutôt que le salariat, c’était le lien subordination qui était la cause et le moyen de l’aliénation ? Et s’il fallait le supprimer ? Et si on renforçait les garanties individuelles et collectives apportées par le salariat, pour donner aux travailleuses et travailleurs un réel pouvoir de décider pourquoi et comment travailler ?
Olivier Frachon
L’insoutenable subordination des salariés, Danièle Linhart, Éditions Èrès, 2021, 25€
A lire également
Les invisibles
« Retour à Heillange »
Monsieur