Notes d'actu.

Notre récit d’un monde en mouvement.

Troisième mois de la révolte des femmes en Iran

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Vie, Liberté !

Cette révolte est déjà la plus longue et la plus étendue géographiquement qu’ait connue l’Iran depuis très longtemps. C’est aussi la plus diversifiée par la composition des forces qui y participent. En grande majorité ce sont des jeunes femmes et hommes des couches moyennes et des ouvriers défavorisés qui sont en première ligne des combats. La vigueur de la résistance historique des kurdes iraniens, une fois de plus, y joue un rôle prépondérant. Par le refus du port du voile islamique, c’est le cœur du système idéologique du régime qui est visé. Mais ce n’est pas tout. Plus le mouvement dure, plus les demandes se précisent. Un communiqué des « Femmes activistes de l’intérieur du pays », daté du 22/11/2022, se termine ainsi :

« […] Et nous ne nous arrêterons pas tant que nous n’aurons pas éradiqué toute forme de violence et de discrimination à l’égard des femmes.

– Pour une société dans laquelle toutes les formes de discrimination, y compris la discrimination de classe, de genre, sexuelle, ethnique/nationale, religieuse et de handicap, ont disparu.

– Une société laïque dans laquelle la religion, le clan ou le gouvernement n’ont aucune autorité dans nos vies […]

– Une société libérée des relations capitalistes […] et libérée du pillage excessif des ressources environnementales. […]

– Une société où chacun dispose de services sociaux de qualité gratuits (jardin d’enfants, éducation, cuisine, services sanitaires et médicaux, etc.). […]

– Une société dans laquelle le droit de se former, de s’organiser et de manifester est reconnu.

Nous sommes toujours au milieu de la bataille. » 

On vient de loin ; l’hégémonie du discours proposant de « réformer par le haut » pendant 20 longues années et l’alignement de certaines femmes militantes connues sur cette position avait affaibli le mouvement féministe, au point de quasiment disparaître des luttes sociales en tant que force indépendante. C’est dans le sillage du mouvement de révolte de décembre 2017 et avec l’action des « Filles de la rue de la Révolution » et leur enlèvement du hijab en public, que la lutte des femmes prit de l’ampleur et entra dans une nouvelle phase. Mais le niveau d’organisation des femmes militantes reste très faible. Depuis le grand mouvement « Un million de signatures » des années 2006-2013, Il n’y a pas un comité ou groupement connu nationalement, mais comme le montre le communiqué ci-dessus, cela commence à s’organiser.

Pendant ce temps le mouvement revendicatif des travailleurs continue et les grèves et autres formes de protestations ne manquent pas. Mais, après une première grève politique des travailleurs du secteur sensible du pétrole et la répression féroce qui a suivi (350 grévistes arrêtés,  dont on est encore sans nouvelle), le mouvement se poursuit mais à travers des protestations politiques dispersées  de la part des prolétaires. Les travailleurs de l’Aciérie d’Ispahan, Sucrerie de Haft-Tapeh, entre autres, ont montré leur solidarité avec le mouvement. Comme en 1978-79, les prolétaires sont en retard, mais ça commence.

Behrooz Farahany, militant de la Solidarité socialiste avec les travailleurs d’Iran (www.iran-echo.com), 24/11/2022

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