Notes d'actu.

Notre récit d’un monde en mouvement.

Serbie : révolte étudiante

“Vous ne nous écraserez pas !” répondent les manifestant·e·s au pouvoir et à la voiture qui, le 16 janvier, a foncé dans la foule des étudiant·e·s rassemblé·e·s à Belgrade, comme chaque jour à 11 h 52 en l’honneur des quinze victimes de l’effondrement de l’auvent de la gare de Novi Sad, le 1er novembre dernier. Le président Aleksandar Vucic a appelé à “punir sévèrement” les responsables de cette tragédie qui s’est produite dans la gare, mais rien n’a été fait. Les étudiant·e·s accusent les dirigeants corrompus, par l’intermédiaire desquels des proches de fonctionnaires ont passé les commandes de construction de cet auvent. Ils et elles demandent également que Vucic lui-même soit tenu pour responsable. Dans un appel les étudiant·e·s expliquaient en décembre dernier « Nous avons suspendu nos études, organisé des assemblées générales et voté des revendications, créé des groupes de travail. Nous avons occupé les locaux des facultés et les avons adaptés à notre vie quotidienne. Nous avons installé des cuisines, des dortoirs, des pharmacies, des ateliers, des cinémas et des salles de classe qui dispensent des cours pendant la grève. En trois semaines, presque tous les bâtiments universitaires de Serbie sont devenus des centres d’auto-organisation politique 24 heures sur 24. Nous recevons le soutien de nos concitoyen·ne·s, dont les dons nous permettent de vivre. Chaque jour, d’autres groupes vulnérables de la société se joignent à notre lutte… Nous mettons en pratique le principe de la démocratie directe. Lors de ces réunions, tout le monde a une voix égale et le droit de décider de toutes les questions ». De son côté, le syndicat indépendant des éducateurs, de nombreuses écoles et personnes employées dans l’éducation se sont opposé·e·s à la décision des syndicats « représentatifs » de poursuivre les négociations avec le ministère de l’Éducation et a annoncé qu’il se mettrait en grève le 20 janvier. Les théâtres de Belgrade et de Serbie ont annulé leurs représentations en signe de soutien et de solidarité avec les étudiant·e·s. Des troupes de théâtre de Belgrade, ainsi que le Théâtre national serbe de Novi Sad, puis le Théâtre national de Sombor, ont annulé leurs représentations et ont lu une déclaration de protestation contre la tentative d’assassinat d’une étudiante en référence à la voiture qui a foncé sur les étudiant·e·s. Celle-ci souffre de graves blessures. Plus tôt le 15 janvier, le syndicat TENT a décidé de se mettre en grève et demande « la satisfaction des revendications des étudiant·e·s, la détermination des responsabilités dans la situation catastrophique de l’industrie électrique – mais aussi la destitution du directeur général de l’EPS AD, de l’ensemble du directoire, du conseil de surveillance, de l’Assemblée de EPS, et le Ministre des Mines et de l’Énergie. » Trois jours plus tard entre 53 000 et 55 000 personnes ont participé à une manifestation devant la Télévision Radio de Serbie (RTS), sous le mot d’ordre “Notre droit à tout savoir” ce qui constituait selon un quotidien serbe l’un des plus grands rassemblements de l’histoire de la Serbie. À la suite du mouvement étudiant, d’autres secteurs de la société serbe se mettent en mouvement. « Pour beaucoup, la grève générale apparaît comme la seule action collective qui mènerait à la chute du régime et à la résolution de la crise politique » explique le média en ligne d’opposition Masina.

A la suite de ces manifestations, le premier ministre serbe, Milos Vucevic a démissionné le 25 janvier. « Afin d’éviter de ne pas augmenter davantage les tensions dans la société, j’ai pris cette décision », a-t-il déclaré. Une première victoire du mouvement des étudiant·e·s.

Patrick Le Tréhondat

 

 

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