Les politiques néolibérales déclinées en France depuis une trentaine d’années, ont comme axe la réduction du budget de l’État au profit du privé comme partout ailleurs sur la planète. Le diktat du supposé « équilibre budgétaire » s’est décliné par la mise en place de mesures d’austérité réduisant drastiquement les moyens de fonctionnement de l’ensemble des services publics.
Dans l’éducation nationale et l’enseignement supérieur, elles se traduisent notamment, par une réduction constante du nombre de postes, dégradant les conditions de travail et d’apprentissage. Depuis plusieurs années, le non-remplacement des collègues parti∙es à la retraite et la diminution du nombre de places des concours de recrutement pour les 1er et 2d degrés d’une part, le manque d’attractivité du métier dû, notamment, aux bas salaires et aux manques de moyens matériels de fonctionnement d’autre part, causent un déficit d’enseignant∙es .
À chaque rentrée scolaire, pour pourvoir les postes restés vacants dans les écoles, le ministère, soit recrute des professeur·es supplémentaires sur la liste complémentaire du concours, soit fait appel à des contractuel·les. Dans le premier cas, les professeur·es stagiaires reçoivent une formation et peuvent prétendre à une titularisation. Dans le deuxième cas, le contrat s’arrête à la fin de l’année scolaire et c’est le retour à la case Pôle emploi. Il s’agit donc d’un choix politique : créer des emplois pérennes ou généraliser la précarité.
A titre d’exemple, dans le premier degré, au 1er octobre 2022, 3 500 professeur·es des écoles contractuel·les avaient été recruté·es, soit 38% de plus que l’année précédente à la même date. Au lieu d’ouvrir plus de postes au concours, le ministère organise la précarité de ces enseignant·es contractuel·les qui subissent un manque criant de formation et d’accompagnement lors de leur entrée dans le métier, et toute l’instabilité d’un CDD. Dans le supérieur, environ 35% des effectifs sont des travailleurs et travailleuses précaires.
Malgré l’organisation de luttes importantes pour contrer les politiques de démantèlement des services publics, la casse des droits sociaux, et l’explication exhaustive du désastre annoncé de cette logique néolibérale, le rapport de force en faveur de notre camp social semblait, depuis presque deux décennies, n’être qu’un horizon qui ne serait jamais atteint.
L’utilité vitale des services publics lors de la crise sanitaire due au Covid, a mis en évidence leur manque de moyens : la réduction « des coûts » de l’hôpital s’est soldé par un coût humain effroyable. Le principe de réalité du nombre de mort·es a été une première brèche. L’utilité sociale de l’école mise en avant, car, qui dit écoles fermées, dit travailleuses et travailleurs dans l’impossibilité de se rendre au travail. Le principe de réalité des « gosses à la maison » a été une deuxième petite brèche….
Le besoin de défendre et d’améliorer les services publics s’est révélé, de nouveau, une évidence pour la population et un aveu d’échec des politiques néolibérales des gouvernements successifs.
Depuis plusieurs mois, partout c’est le même constat d’une augmentation des dépenses courantes (énergie, carburant, prix alimentaires…), tandis que les salaires, minimas sociaux et pensions ne suivent pas, voire ont largement décroché. La paupérisation s’accentue et se généralise avec des profits records des entreprises du CAC 40.
La puissance inouïe de la mobilisation en cours contre la réforme des retraites imposée par le gouvernement, 49.3 à la main, et les violences policières dans la rue, nous consolident. La force de ce mouvement repose sur une unité syndicale historique et une mobilisation enracinée partout dans le territoire, avec des actions, des manifestations et surtout des grèves.
Même si les grèves doivent être renforcées, car la grève n’est jamais acquise et doit être discutée chaque jour avec nos collègues, le rapport de force en faveur de notre camp social est de retour. Le mouvement ouvrier, comme lui seul peut le faire, a provoqué une crise politique majeure qui laisse entrevoir que la logique néolibérale arrive au bout car les travailleuses, les travailleurs, les étudiant∙es, les privé·es d’emploi, les retraité∙es sont à bout.
Nara Cladera
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