Le livre part du discours, le 13 octobre 2022, de Josep Borrell, vice-président de la commission Européenne, pourtant socialiste : « Oui l’Europe est un jardin…Tout fonctionne… La plus grande partie du reste du monde est une jungle et la jungle pourrait envahir le jardin ».
Il ajoute : « Gardez le jardin, soyez de bons jardiniers… prenez soin de la jungle à l’extérieur… sinon, le reste du monde nous envahira ». Cette terrible métaphore illustre bien à la fois le mépris, la peur de l’autre – différent – et la persistance d’une mentalité coloniale ; cette « bonne conscience civilisationnelle ».
Elle (l’Europe) dit au reste du monde (la jungle) qu’elle n’accepte toujours pas qu’il ne soit pas à son image. Non seulement elle ne renonce pas à en avoir la maîtrise, avec sa projection nord-américaine (l’occident), mais elle persiste à penser qu’elle incarne la civilisation, la culture, le bien face à la barbarie d’un environnement mondial où régnerait la sauvagerie, l’obscurité et le mal. Et cette bonne conscience sert de justification à toutes les dérives identitaires.
En lisant ce livre, écrit avant la guerre en Iran, on comprend bien qu’Israël se proclame Jardin avancé de l’occident, entouré d’une jungle dont elle s’octroie le droit de la transformer à son image. Ce qui implique de libérer des territoires pour développer son jardin (faire de Gaza une Riviera…) quitte à en génocider les populations.
Alain Lacombe
Le jardin et la jungle, Edwy Plenel. Éditions La Découverte, Septembre 2024, 18 €
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