Horizons d'émancipations.

Une série de dossiers. pour mieux (se) comprendre.

Une bande de nuls ? 

En France, nous venons d’avoir un nouveau gouvernement, à peine désigné qu’il se heurte à l’expression de colères. On n’avait même jamais vu un premier ministre autant discrédité le jour même de son investiture.

A votre avis, comment expliquer cette défiance ? Est-elle seulement due à l’équipe présentée ou recouvre-t-elle un rejet plus systémique ?

Gérard
Je pense qu’il y a les deux. La nullité crasse du personnel politique est largement démontrée mais il se passe quelque chose de plus profond dans la société C’est ce qu’il s’est passé 

récemment avec les paysans. Il me semble qu’il y a quelque chose qui a changé, une espèce de prise de conscience sur le registre « ça ne peut plus continuer comme ça ».

On connait depuis 2008 une dégradation continue. Notre génération avait espoir que nos enfants continueraient à bénéficier de l’ascenseur social et maintenant c’est de plus en plus hypothétique. La crise financière de 2008 a été un coup de frein et depuis (élection de Sarkozy-NDLR) c’est un coup de frein et un ascenseur social en panne. Nos enfants vivent plus mal que nous.

Sami
Concernant la question qui nous a été posée au début je dirai les deux mon capitaine. Je pense que c’est lié à la nullité de la classe politique mais paradoxalement je préfère quand ils sont nuls car là ils ne peuvent pas camoufler leur hypocrisie et s’ils ont une excellence c’est d’arriver à faire ce qu’ils font.

Leur objectif est de faire passer pour des mesures pas trop dégueulasses des mesures scandaleuses. C’est ça leur talent. Les choix faits par l’E.N provoque une grande colère chez les enseignants (groupes de niveau, tri des élèves). Ils reprennent ce qui se faisait avant les années 60 et l’assument. Ça révèle quelque chose de plus profond. On peut toujours aller plus loin et la corde peut toujours se tendre davantage. Les objectifs de ceux qui nous gouvernent c’est de nous faire oublier ce qu’on subit ou que les gens pensent qu’ils sont eux-mêmes responsables de ce qu’ils subissent.

Joëlle
On était persuadé qu’en travaillant les mobilisations, on arriverait à faire reculer le pouvoir. Puis il y a eu une grande période d’endormissement et il y a eu un moment me semble-t-il où la contradiction entre les intentions déclarées par les puissants et la réalité a fini par faire de puissantes mobilisations, par exemple les mobilisations sur les retraites et pourtant on n’a pas gagné. Il y a des prises de consciences qui se font mais peut-être qu’elles se font trop secteur par secteur. Il y a encore trop de fatalité par rapport à un changement global. En fait pour pouvoir faire pression sur le Pouvoir, il faut qu’il ait peur et pour cela il faut qu’il y ait un projet politique alternatif, c’est-à-dire un projet qui non seulement fédère tous les mécontentements mais qui les mette en cohérence, c’est-à-dire que ça ne soit pas juste une juxtaposition de revendications et de mécontentements mais qu’on arrive à tisser des liens entre tout ça.

Ce qui est vraiment à l’ordre du jour c’est la construction d’un projet politique global, clairement comment faire pour détruire le capitalisme ?

Pierre
Vous avez été deux à évoquer la nullité du personnel politique. Un rapide coup d’œil sur la préparation des élections américaines ou sur ce qui s’est passé en Italie ou ailleurs, soit vraiment on n’a pas de bol, parce qu’on tombe régulièrement sur des connards, soit il y a quelque chose de plus systémique.  

Laurie
Au-delà de leur nullité effective, pour moi il y a aussi le côté « il n’y a plus de vernis » ; donc là ils elles pour le coup se sentent complètement légitimes à être là. Au-delà de me dire que c’est vraiment à l’opposé de toutes les valeurs qu’on peut défendre, ça me questionne  sur comment c’est possible qu’avec de tels degrès d’incompétence sur le terrain, ils et elles puissent se maintenir sans que ça pose aucun problème. Et du coup ça vient questionner pour moi le comment ça se fait qu’il y a ce sentiment de légitimité qu’on n’a pas nous collectivement dans nos réseaux militants et qu’on a du mal à avoir quand bien même on défend des valeurs de justice sociale, d’égalité bien plus importantes. Et du coup je ne sais pas si c’est une question de nullité, c’est pas seulement chez nous, c’est pas depuis deux ans, il y a bien la question que quand même -comme tu le disais tout à l’heure- il n’y a pas suffisamment de peur de leur côté.

Cet article fait partie du dossier :

Horizons d'émancipation

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