Le 1er mai, un dirigeant syndical local du Syndicat coréen des travailleurs de la construction (KCWU), Yang, s’est immolé par le feu devant un tribunal pour protester contre les poursuites dont font l’objet des syndicalistes. Il devait comparaître devant un tribunal à 15 heures le 1er mai et il est décédé quelques heures plus tard, à son arrivée à l’hôpital.
La police a effectué plus d’une douzaine de descentes depuis la fin de l’année dernière dans des locaux syndicaux. Plus de 900 syndicalistes ont fait l’objet d’une enquête et 18 dirigeants syndicaux ont été arrêtés. Le gouvernement du président Yoon Suk-Yeol n’a jamais caché son programme anti-syndical et anti- ouvrier. Il a lancé de violentes attaques contre la grève des camionneurs et tenté de faire passer des politiques anti-ouvrières en matière de travail.
Le 8 avril, 4 500 camionneurs, membres du Syndicat coréen des travailleurs de la fonction publique et des transports (KPTU-TruckSol), se sont rassemblés devant l’Assemblée nationale. Il s’agissait du premier rassemblement de masse organisé par le syndicat depuis fin 2022. La principale demande des camionneurs était le rétablissement d’un salaire minimum et des protections de travail minimales pour les conducteurs de camion propriétaires (officiellement indépendants) afin d’améliorer leur niveau de vie et la sécurité routière. Dans la construction, où travaillait Yang, d’un peu plus de 70 000 membres en 2015, les efforts de syndicalisation ont permis à la KCWU de devenir un syndicat de 160 000 membres. Si l’on y ajoute les membres de la Fédération des syndicats coréens (FKTU), plus conservatrice, 250 000 travailleurs de la construction sont aujourd’hui syndiqués en Corée du Sud. L’une des principales victoires de la lutte du KCWU a été l’abolition de la sous-traitance. Deux autres responsables syndicaux du secteur de la construction font l’objet d’une enquête pour avoir obligé des entreprises de construction à embaucher des travailleurs syndiqués et pour avoir perçu des cotisations syndicales, ce que la Justice qualifie d’intimidation et d’extorsion.
Les récentes attaques du gouvernement et des entreprises de construction contre le KCWU doivent être comprises dans le contexte de la montée en puissance des syndicats. Face à cette répression croissante, le mouvement syndical coréen ne recule pas. La Confédération coréenne des syndicats (KCTU), à laquelle la KCWU est affiliée, a déjà annoncé une série d’actions de grève et de rassemblements au cours des deux prochains mois. Le KCWU vise à mobiliser ses 160 000 membres du syndicat pour faire grève en juillet. La KCTU met en place une large alliance pour la grève générale « anti Yoon Suk-Yeol » pour le mois de juillet. Alors que la crise sociale et politique s’aggrave en Corée du Sud, cette lutte est rapidement devenue un champ de bataille essentiel. Ses résultats façonneront sans aucun doute l’avenir du mouvement ouvrier et de la société coréenne.
Patrick Le Tréhondat
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