Je pose comme principe que pour détruire son ennemi, il faut le bien connaître.
Je me propose donc d’écrire une première partie où j’insisterai sur les tenants et les aboutissants du capitalisme et une seconde où j’expliquerai pourquoi il est urgent de s’en débarrasser et comment.
Le capitalisme .
Est-il la suite économique logique de l’Histoire ( avec un grand H) ou une anomalie événementielle ? La suite vous le dira :
Au fil des siècles, le capitalisme n’a pas cessé de se transformer pour s’adapter aux réalités de la société dans laquelle nous vivons.
- A la fin du Moyen Age, le féodalisme qui était basé sur un capital terrien et sur l’exploitation des paysans a été peu à peu attiré par la manière dont les bourgeois gagnaient facilement de l’argent pour le transformer soit en capital terrien, soit humain ( avec l’esclavage par exemple) soit monétaire avec les prêts et les intérêts. Ce fut l’avènement du capitalisme auquel plus ou moins tous les pays développés se sont ralliés. Leur structure sociale s’est transformée entraînant l’essor de la classe marchande, exploitant et explorant toutes possibilités de gains , avec notamment la colonisation, l’industrialisation et les nouveaux systèmes financiers, au détriment des classes laborieuses, terriennes et salariales .
- Historiquement, d’après Max Weber *, le capitalisme se serait initialement formée au XVIe siècle, dans le milieu calviniste, comme un moyen de faire face aux conséquences psychologiques de la théorie de la prédestination (le décret éternel de Dieu, par lequel il a scellé en lui-même ce qu’il voulait que chaque homme devienne) . La Réforme protestante a donc introduit un mode de vie ascétique mais qui valorisait le travail acharné et le réinvestissement, contribuant ainsi à la croissance capitaliste
- Pour Karl Marx ( XIXème)* le capitalisme est centrée sur le salariat . Son principe fondamental est la recherche par les propriétaires de plus-values sur les moyens de production et de distribution s’appuyant sur l’exploitation des travailleurs .
Une approche plus libérale, liée à l’économie de marché, caractérise ce modèle par la décentralisation et l’intervention limitée de l’État ce qui permet encore plus d’efficience, par la compatibilité acquises entre les décisions individuelles.
- Au XXème siècle, chaque pays organise librement son système économique, capitaliste
L’économiste français Bruno Amable* détermine ainsi cinq formes de capitalisme
– le capitalisme libéral des pays anglo-saxons (Australie, Canada, Royaume Uni et États-Unis) ;
– le capitalisme social-démocrate scandinave (Danemark, Finlande et Suède) ;
– le capitalisme européen continental présent en Suisse, aux Pays-Bas, en Allemagne, en France et en Autriche ;
– le capitalisme méditerranéen en Grèce, en Italie, au Portugal et en Espagne ;
– le capitalisme asiatique très présent au Japon et en Corée du Sud
- Avec le développement au XXIème siècle des nouvelles technologies de l’information et de la communication, l’accroissement du rôle de la finance, au niveau international, a fait naitre un capitalisme dit actionnarial, privilégiant un modèle d’actionnariats, auxquels l’entreprise rend des comptes . Les normes comptables sont devenues un instrument de communication et de contrôle pour améliorer la transparence et la gestion des entreprises. ( voir Piketty)
Et la mondialisation contemporaine a largement contribué à la création de formes d’hybridation du capitalisme.
Mais sa finalité reste toujours la recherche d’un super profit pour quelques-un·es, au détriment drastique du plus grand nombre de nos concitoyen·nes.
Assez ! Le capitalisme ça suffit ! Vivent « les communs »
Il est grand temps de développer un autre modèle économique où le commun l’emportera sur l’individuel, où toutes et tous partageront selon leurs choix et leurs besoins, tout ce qu’ils et elles auront fait naître et développer, ici et ailleurs.
Comme le dit Christian Ansperger* il faudra « S’orienter vers de nouveaux principes de vie, repenser profondément la social-démocratie et inaugurer une vision “communaliste” de l’économie, créer des “communautés existentielles critiques” , tout en promouvant une éthique de la simplicité volontaire, de la redistribution radicalement égalitaire et de la démocratisation profonde »
Quelque part ce que l’on voit fleurir ici ou là dans les esprits et dans les actes (et cela bien avant notre ère), répond déjà à ce fondamental-là. La démocratie, dont nous sommes, nous les français·es si fièr·es, s’incarne dans la mise en « commun ». La mise en commun de tout, et surtout de ce qui s’appelle : la bonne vie ou la « vie bonne »
On a découvert que des petites sociétés paysannes dans des endroits très différents du monde avaient mis en place, parfois depuis des siècles, et encore de nos jours, leurs propres institutions, leurs propres droits, leur propre système d’autogouvernement démocratique, leurs propres règles de fonctionnement pour gérer les espaces communs, naturels ou autres, au service de la collectivité et des générations futures, non comme une « ressource » qui dépend de son propriétaire, du marché ou de l’État, mais comme un bien intrinsèque appartenant à chacun·e et à tou·tes.
Voilà donc, une preuve, s’il en était besoin, que les pratiques et la capacité humaine à l’auto-organisation et au partage collectif en vue d’assurer la satisfaction des besoins, est consubstantielle à la nature humaine (comme la prédation d’ailleurs, malheureusement…).
Les habitant·es du Rojava par exemple, expérimentent cette façon-là de vivre . C’est d’ailleurs ce que mettent en place les adeptes du « communalisme » (au niveau des communes en France par exemple). C’est sur ce principe des « communs » que s’appuient, le mouvement dit de la « gratuité », celui de la sécurité sociale de l’alimentation et de nombreuses associations comme « les soulèvements de la terre »..etc… autres ZAD et habitations participatives/collectives, qui s’opposent aux conséquences mortifères du capitalisme prédateur, (lequel finira, je n’en doute pas, après l’achèvement des dégâts humains et écologiques par se faire harakiri) .
Il est grand temps de se mobiliser pour le détruire. Mais nous ne pouvons pas le faire directement, ni par la force, ni de manière guerrière, en face à face. Il est bien trop impérialiste et puissant. Il nous faut agir en sourdine, comme un ferment dans la pâte à pain en lui ôtant peu à peu ses prérogatives.
On vient de voir au paragraphe précédent comment « le bon ver est dans le fruit ». C’est l’ idée du « commun ». Apprenons à la nourrir, cette idée-là, pour qu’elle grignote tout le fruit, dans lequel, elle et nous sommes enfouis, ce fruit, appelé « capitalisme ».
Chaque jour déboulonnons un petit rouage de ses fondations !
Pour se faire pourquoi ne pas s’inspirer des écrits d’ Elinor Ostrom* après ses recherches. Elle nomme jeux polycentriques ce que seront les indispensables procédures citoyennes de prises de décision collective, qui pourraient avoir lieu à plusieurs niveaux, du bas vers le haut, pour arriver à un mécanisme de choix constitutionnels, au sommet. Il s’appuie sur l’efficacité démontrée des réussites communalistes en France et ailleurs. – des entreprises, des écoles, des hôpitaux, des théâtres, etc. – pourraient être organisées comme des «communs », afin de les libérer de la pression du marché et/ou des modes d’organisation bureaucratique : on parle de « communs économiques », de « communs sociaux », de « communs culturels », de « communs urbains », etc.
Le principe politique du commun rentre en conflit avec la logique marchande du privé comme avec la logique du public au sens bureaucratico-étatique du terme. Dans la mise en place des communs c’est la société et non l’État qui porte la réalisation de l’égalité, de la liberté et du bien de tous. En fait l’« institution du commun » se présente comme un horizon révolutionnaire à long terme. Il propose une nouvelle version du communisme, non plus fondé sur l’effondrement du système capitaliste ni sur les seules luttes du monde du travail, mais sur la capacité humaine universelle, à instituer l’autogouvernement et le partage. C’est un pari.
Pas facile à réaliser. L’ initiative qui a eu lieu récemment en ce sens à Barcelone et qui a capoté, le montre bien.
Mais les échecs aident à trouver le chemin des réussites futures. On apprend toujours de ses erreurs . Par exemple on s’est bien rendu compte que le principe des coopératives qui permettent aux ouvrier·es d’être propriétaires de leur entreprise n’est pas satisfaisant en l’état. Il faut aller plus loin. Ne pas se contenter de faire du commun avec l’entreprise. Il nous faut considérer tout ce qui nous est commun et le gérer en tant que tel, avec nos voisins, nos quartiers, nos commerces, nos lieux de vie quels qu’ils soient et ne pas les insérer, même de façon minime, dans les propositions, parfois alléchantes, du capital.
Bien entendu, pour commencer, il faudra apprendre à s’auto-organiser, à tous les niveaux, sans chef·fe mais avec des responsables devant les participant·es ( quelle que soit leur dénomination). à cette organisation. En construisant ainsi des collectifs gérés démocratiquement de la base au somment, on devrait arriver au plus haut de l’État avec des responsables adoubés par toutes et tous. L’État lui aussi appelé « commun » serait responsable devant les collectifs qui les (les membres de ce commun) auront désignés démocratiquement. Ces procédures pourraient être conçues également à l’échelle internationale, dans les pays qui le souhaitent. Ce serait sans doute alors la fin, des guerres de pouvoir, qu’elles soient économiques, financières et/ou militaires.
Le temps qu’il faudra, pour grignoter ainsi pas à pas, la grande machine mondiale, qu’est le capitalisme, se comptera sans doute en dizaines d’années, mais mieux vaut un combat lent mais sûr, qu’un grand chamboulement où tout le monde perdant sa propre boussole, seul·es, celles et ceux qui ont du pouvoir, retrouvent leur chemin. Et tout recommence comme avant….
Apprenons à grignoter le capitalisme !
Chaque jour déboulonnons un petit rouage de ses fondations !
ET……Il s’écroulera !
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Mes Références
*Max weber : L’Éthique protestante et l’Esprit du capitalisme
*Karl Marx : Le Capital
*Bruno Amable : Les cinq capitalismes
*Christian Ansperger : Éthique de l’existence post-capitaliste. Pour un militantisme existentiel,
*Elinor Ostrom : La Gouvernance des biens communs : pour une nouvelle approche des ressources naturelles
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