L’électrification d’une partie des usages de l’énergie est l’une des conditions de la transition énergétique et de la décarbonation de l’économie. Or l’électricité est un système industriel complexe, s’appuyant sur une industrie élaborée et nécessitant des organisations importantes, incluant le développement et l’exploitation des réseaux, l’ingénierie nécessaire à la construction et à l’exploitation des moyens de production, à la maille du pays.
La privatisation d’EDF et GDF, la mise en place du marché, ont profondément transformé l’organisation du travail en leur sein, réduit les moyens et généralisé la sous-traitance et l’achat de prestations au prétexte de se recentrer sur le cœur du métier. La situation actuelle met en évidence que l’électricité, et plus globalement l’énergie, relèvent d’un bien commun et non d’une marchandise et que sa production comme sa distribution relèvent du service public. Car laisser au marché et au secteur privé la maîtrise de ce secteur c’est non seulement courir le risque de la flambée des prix et donc de l’accroissement des inégalités et des privations comme de l’impact sur l’emploi et l’activité, mais c’est aussi abandonner la planification à la seule rentabilité financière et aux subventions.
C’est aussi renoncer à disposer d’un outil pour accompagner le secteur industriel qui devra nécessairement être partie prenante dans la reconstruction du secteur comme dans le développement technologique, dans la recherche et le développement sur les moyens de production comme sur les usages et l’efficacité énergétique. Avec trois questions à débattre pour préciser le cadre et le statut de cet acteur industriel.
Quel outil pour assurer l’accès au bien commun qu’est l’énergie ?
En outre, la transition énergétique c’est aussi plus d’efficacité dans les usages, comme dans le développement de productions renouvelables, locales et diffuses, ce qui nécessite aussi un accompagnement des usagers et des collectivités dans les actions de rénovation de l’habitat par exemple. Le service public ne pourrait-il pas aussi être l’outil au service des collectivités territoriales, comme des consommateurs ? Ce qui exigerait de renouer avec la proximité qui prévalait lors des périodes précédentes mais aussi de réfléchir sur les conditions de l’exercice de la démocratie. En assurant des missions de conseil et en étant aussi un véritable acteur dans la construction des solutions et le développement du secteur de l’industrie correspondant.
Ce rôle doit bien évidemment être celui de l’acteur public, interlocuteur des différentes industries concernées, de la production aux usages, des entreprises qui seront mobilisées au plus près des territoires. Un rôle qui implique d’investir dans la recherche et le développement, dans l’ingénierie comme dans la proximité, la place de la démocratie dans ces organisations
Organisation nationale possédant une dimension centralisée, il est nécessaire aussi de travailler à la place que les différents échelons démocratiques du pays devront occuper dans les choix stratégiques qui prévaudront. C’est vrai au niveau national mais c’est aussi vrai aux échelons régionaux et locaux, condition essentielle pour combattre l’étatisation qui a été celle d’EDF et GDF par le passé. Cette dimension est nouvelle et nécessite d’être travaillée, débattue car elle est aussi une condition indépassable pour que la transition énergétique et la planification ne soient pas que l’affaire des techniciens et des technocrates mais bien celle de la population. Condition indépassable pour que l’ensemble des choix et décisions, la nature et le contenu de la sobriété, le mix énergétique et les arbitrages entre énergies, l’implantation des futurs moyens de production, et les actions à engager sur les territoires soient réellement acceptés.
La place du travail, le statut des salariés :
Au sein de cette organisation, comme partout, la question de la démocratie, la possibilité donnée aux salariés d’intervenir sur les objectifs comme sur les moyens de les atteindre sera une condition essentielle, indispensable pour réussir la transition énergétique. L’histoire des industries électriques et gazières montre la place qu’ont occupé les femmes et les hommes du service public pour permettre à EDF et GDF d’approvisionner le pays en électricité et en gaz jusqu’à la déréglementation et la privatisation des années 2000. Avec, toutes choses égales par ailleurs, un statut qui reconnaissait la qualification et des lieux où la conflictualité autour du travail pouvait s’exprimer !
O.F.
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