Horizons d'émancipations.

Une série de dossiers. pour mieux (se) comprendre.

Rêves de Tour…

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Dans les années d’après guerre, les exploits sportifs ne touchaient pas beaucoup la campagne berrichonne : manque d’information, peu de presse. Seule la radio en parlait mais son usage était réduit. Certes on connaissait le foot-ball, les clubs de Lille, Reims, Le Racing, les joueurs de légende Jean Baratte, Grégory Vignal, la boxe, Marcel Cerdan, et Laurent Dauthuile, mais la vedette dés le retour de l’été, c’était le Tour de France !

En 1947 j’avais onze ans et passionné, j’écoutais (en cachette) les arrivées des étapes avec les commentaires de Georges Briquet. Je rêvais des exploits d’Edouard Fachleitner, LucienTeisseire, Pierre Brambilla et j’espérais la victoire de René Vietto… Ce fut Jean Robic !

Pendant mes années collège, je suivais toujours le tour et chaque semaine j’achetais MIROIR-SPRINT et les numéros spéciaux d’après tour. Je connaissais tout des victoires de Bartali, Coppi, Kubler, Koblet jusqu’au fameux triplé de Louison Bobet. Je ne ratais pas la réunion d’après tour sur la piste du stade Gesset à Saint-Amand-Montrond où les vedettes du Tour se frottaient aux champions locaux.

Je suivais les résultats des coureurs berrichons depuis l’échappée record d’André Bourlon[1] en 1947 lors de l’étape Carcassone-Luchon, Georges Meunier, Jean Graczyck, Jean Marie Cieleska, Marcel Dussault jusqu’à Roger Walkowiak[2].

Je rêvais de vélo. Je m’arrêtais souvent devant la devanture des cycles Desdions où était exposé un magnifique vélo Stella (la marque de Louison Bobet). Je transformais mon vieux « clou » aux pneus demi-ballon, roue de 0,65 , en y ajoutant des cales-pieds et un guidon de course. Chaque matin j’enfourchais cet engin pour parcourir les 8 kms qui me séparaient du collège, 15 minutes, 32 km/heure…

A midi après le repas, avant de retourner au collège je passais par la terrasse d’un café où se rassemblaient les coureurs du club local. J’écoutais leurs commentaires, j’admirais leurs vélos…

Un vélo Stella

J’ai attendu d’avoir cinquante ans pour m’offrir un demi-course et à plus de 80 berges je m’arrête encore pour admirer une belle mécanique…

Si je regarde encore avec intérêt les arrivées d’étapes à la télé, le déroulement de la course écrasée par les tactiques d’équipes qui laissent peu de chance aux exploits solitaires et aux longues échappées, je ne connais plus les palmarès des cinquante derniers tours.

Si j’avais onze ans aujourd’hui, je n’aurais sûrement plus envie d’être coureur cycliste.

Bernard Larue


[1]    En 1947, André Bourlon a battu un record qui tient toujours aujourd’hui, celui de la plus longue échappée en solitaire dans le Tour de France, lors de l’étape Carcassonne-Luchon.

[2]    Cycliste professionnel après avoir été tourneur, vainqueur du Tour de France en 1956

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