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Présidentielle et crise de la politique

Peut-on qualifier de républicain le fait qu’une personne soit à elle seule l’institution suprême de laquelle tout dépend ? Au fil des années on vote moins « pour » qu’afin d’éviter pire. Les convictions s’effacent derrière ce qui ressemble à un jeu de billard à cinq ou six bandes. Ces élections ont pris surtout comme thème « sortez les sortants » et une réélection de Macron se ferait davantage par défaut que par soutien à sa politique. Cette fois un pas est franchi. Mis à part celles et ceux qui sont animés/es par la crainte de l’extrême-droite, le moins que l’on puisse dire est qu’à la date où sont écrites ces lignes la présidentielle apparaît dépourvue d’enjeu social, écologique, démocratique. Bien sûr il y a la guerre, ses horreurs et la peur. Bien sûr il y a le Covid. Mais tout mettre sur leur compte serait trop facile. Il y a que pour la plupart des citoyens/nes il n’y a rien à attendre des présidentielles. Bien sûr parce qu’à gauche les forces radicales sont divisées. Mais ce n’est pas un accident. La personnalisation de la présidentielle fait disparaître dans l’ombre de la candidature les forces qui sont DERRIERE elle. Le PC en a fait durement l’expérience. Au fil des élections la gauche est devenue synonyme de PS.

Le système a rendu « rassemblement » et « renoncement » quasi-synonymes. Pour ne pas effrayer les électeurs qu’elle pourrait gagner chez les autres, aucune force ne s’enhardit à se dégager des sentiers battus pour prôner une autre organisation de la société. Deux ans après les Gilets Jaunes, ce qui ressort ce sont des déclarations d’intentions (bonnes évidemment) sans réellement s’affronter au pouvoir et à la domination des actionnaires. Alors qu’il est courant d’entendre dire que les puissances d’argent sont les vrais maîtres de la politique et qu’il est rare de voir tant de mouvements de luttes en période électorale (comme quoi on n’en attend pas grand-chose), qui propose que les mouvements sociaux se prolongent en investissant le champ de l’élaboration politique et de l’intervention dans l’espace institutionnel ? Quelle candidature est issue d’un tel mouvement ? Qui propose de supprimer la propriété lucrative et de la socialiser sous des formes autogestionnaires ? Qui dit qu’en redéfinissant les rapports travail/hors travail il n’y aurait plus de chômage ?  On en reste à dire qu’il faut réduire les inégalités comme si en face quelqu’un menait campagne pour les aggraver.

Et la VIème République ? Comment croire qu’une vraie démocratie puisse nous être octroyée d’en haut ? A-t-on déjà vu dans l’Histoire quelqu’un restituer le pouvoir au peuple après l’avoir pris ?

Tout cela a un relent d’éternel recommencement. Mais à chaque fois de moins en moins de monde  y croit, surtout les jeunes. Ce système est usé. Jusqu‘à la corde. Il ne lui reste que l’apparat médiatique et encore. On comprend le manque de passion d’un grand nombre de personnes. Pour elles ça se passe ailleurs. On-t-elles vraiment tort ? Même G Larcher, Président du Sénat parle de « scrutin illégitime ».  Des mouvements appellent au boycott de façon à ce que l’abstention grandissante deviennent une force collective qui délégitime ce système monarchique. Celles et ceux qui luttent pour leurs droits ou ceux des autres peuples, pour sauver le climat, sont capables de prendre à bras le corps eux-mêmes ces enjeux, de bousculer ce qui paraît immuable, de chercher ensemble, même dans le tumulte, les solutions au-delà de l’horizon capitaliste et d’affirmer : « l’État, c’est nous ».

Pierre Zarka

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