Notes d'actu.

Notre récit d’un monde en mouvement.

États-Unis : un goût de rébellion sociale.

Ils et elles sont près de 5 millions à avoir abandonné leur travail. Une « grève générale » qui ne dit pas son nom. D’autres sont en grève sur leurs lieux de travail. À la fois contre leurs patrons mais aussi contre leurs directions syndicales bureaucratiques.

Revenons sur ce qu’on appelle désormais la « grande démission ». Certains/es de ses « refuzniks » se filment en direct en quittant leur travail et en s’exclamant « Content/e de quitter ce boulot de merde ! » et diffusent leur message sur les réseaux sociaux. Succès garanti. Le patronat est désemparé, mais la gauche également qui peine à comprendre ce phénomène. Les secteurs les plus touchés sont l’hôtellerie, la restauration et le commerce mais aucun secteur n’échappe au mouvement comme par exemple les banques. Une rébellion sociale qui certes ne trouve pas ou ne choisit pas les moyens d’une expression collective, mais dont « l’humeur » indique des changements tangibles des relations d’une fraction du salariat au travail.

Ceux et celles qui sont restés/es à leur poste de travail ne sont pas en reste

Chez John Deere (usines de tracteurs) 10 000 travailleurs/ses (sur 14 sites différents) après plusieurs semaines de grève viennent d’obtenir une meilleure convention collective, avec une augmentation de salaire immédiate de 10 % et une prime à la signature de 8 500 dollars et même une forme d’échelle mobile des salaires. Ces travailleurs/ses ont imposé à leur direction syndicale que toute proposition de convention collective leur soit soumise désormais 15 jours avant tout vote de ratification et non 2 jours comme précédemment. La question de la démocratie syndicale est également un objet de conflit dans l’historique syndicat de l’automobile UAW. En cause l’élection des directions syndicales par un système pyramidal de délégués/es. Les syndiqués/es revendiquent une élection directe par les membres eux et elles-mêmes : « Je soutiens les syndicats mais je ne soutiens pas (la direction de) l’UAW. Ils sont corrompus » explique un syndicaliste. Même question dans le syndicat des Teamsters, qui syndiquent bien au-delà conducteurs routiers, notamment dans les entrepôts d’Amazon. Une liste anti-corruption et démocratique soutenue par la Teamsters for a Democratic Union (TDU, regroupement de gauche de syndicalistes) vient d’emporter les élections à la direction du syndicat. Un séisme dans le champ syndical. Ajouton deux autres exemples de conflits. 1 000 mineurs syndiqués en Alabama sont toujours en grève après huit mois, luttant pour une rémunération et des horaires de travail décents et les travailleurs des usines céréalières de Kellogg qui sont toujours en grève depuis deux mois sur la question de leur convention collective. Les exemples de grèves « dures »  se multiplient. Elles ont la particularité de ne pas être sur la défensive face à des licenciements, mais d’exiger des garanties sociales ou des augmentations de salaire. Même, Hollywood a échappé à une grève générale  des 60 000 travailleurs du cinéma et de la télévision,  membres du syndicat IATSE, grâce à un accord trouvé à la dernière minute, accord par ailleurs contesté par de nombreux syndicalistes. Autre victoire récente : 30 000 soignants des hôpitaux Kaiser ont imposé une nouvelle convention collective avantageuse face à une direction particulièrement féroce.

Patrick Le Tréhondat

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