Délicieux.

Articles courts à déguster à tout moment.

Ce sont les masses qui font l’histoire.

La formule de Marx pourrait être aussi d’Hervé Lecorre pour ses romans : L’homme aux lèvres de Saphir et Dans l’ombre du brasier. Le premier se déroule dans le Paris de 1870 où déjà l’assise de Napoléon III vacille, le second, lors des derniers jours de la Commune. Les deux ont pour personnage principal des figures du Paris populaire. Des figures : pas des héros sortis du lot mais ces anonymes que l’Histoire (avec un grand H) et la littérature oublient si souvent : ouvriers, ouvrières, artisans, femmes devenues, pour participer à la Commune, infirmières, d’autres – plus en marge – y jouent un rôle d’animatrices, mères et pères de famille, putes, flics… Si avec empathie, Lecorre décrit les souffrances – parfois le sordide –  il fait, plus que Hugo, surgir la solidarité, la grandeur d’aller au bout de ses idéaux. On vibre avec celles et ceux qui donnent un sens à leur vie par le combat, même si la défaite s’annonce. Dans le tumulte, dans le dépassement de soi et même la peur, des liens se nouent, improbables en temps « normal ». Paris y est rendue vivante par la précision géographique : on suit les trajets et les combats au nom des rues.

L’écriture participe à cette présence du peuple. Parfois on ne sait plus qui de l’auteur ou des protagonistes parlent, tant la narration utilise les mots et les propos des personnages. La qualité littéraire au service de l’irruption vivante du peuple. A moins que ce ne soit le contraire : le peuple qui permet à la littérature d’être présente.

L’homme aux lèvres de Saphir, Hervé Lecorre,  Éditions Payot-Rivages Octobre 2004, 512 pages, 9,15€

Dans l’ombre du brasier, Hervé Lecorre,  Éditions Payot-Rivages,  Janvier 2019, 384 pages, 22,50€

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